Essai – Bentley Bentayga V8 : Le raisonnable a du bon
Les effets de mode ne font guère de distinction : si les origines des courants sont diverses, il est certain que tôt ou tard, la tendance frappera tout le monde. Il en a été ainsi avec la fulgurante percée des SUV, partie des constructeurs premium, puis démocratisés par les marques grand public. C’est sans surprise que la branche du luxe, dont Bentley, s’est rapidement mise à la page, depuis fin 2015, avec le Bentayga.
Texte et photos : Matthieu Giraudier
Le Bentayga fut équipé à l’origine du le monstrueux W12, partagé avec la Continental GT, dont nous vous proposerons très prochainement un essai de la nouvelle génération, et la Flying Spur. C’est à l’aube de l’année 2017 que les britanniques décident d’ajouter à la gamme un bloc V8 diesel, provenant du cousin SQ7, pour enfin, en janvier 2018, compléter l’offre avec une mouture V8 essence, itération qui est ici le sujet de notre essai.
Moins de couple mais plus de puissance que son homologue diesel, que vaut vraiment cette Bentley ? Réponse dans la suite !
A l’extérieur
Ne cherchez pas : les différences avec les autres versions du Bentayga sont inexistantes. Pas le moindre badge distinctif, pas une finition typique du modèle. Il demeure que l’offre de personnalisation est dantesque. Il suffit de parcourir le configurateur en ligne pour s’en convaincre. La liste de coloris de carrosserie est à rallonge, allant de propositions très classiques, comme la teinte gris Hallmark ou le blanc Arctica, à de plus excentriques couleurs comme le vert Radium ou le duo-tones Onyx sur Orange Flame. En ce qui nous concerne, nous héritons d’un bleu Pale Sapphire, discret mais raffiné.
Notre modèle est équipé de la finition « Bentayga Blackline », qui brise un peu l’aspect très uniforme du design, en plaçant moult éléments noirs gloss sur la carrosserie, à commencer par la grille de radiateur « Matrix ».
Pour le reste, notre Bentayga d’essai est ce qu’il est : un engin massif, peu détaillé, reprenant « by the book » le style Bentley. Si les GT ou même les berlines de la marque de Crewe savent me séduire, je dois avouer que je suis bien plus dubitatif pour le SUV. Un gain en caractère, traduit par des lignes plus saillantes par exemple, lui serait très certainement profitable.
A l’intérieur
La relative déception du design extérieur s’évapore sitôt que j’ouvre la porte. L’association du cuir principal brun « Camel » avec le cuir secondaire noir « Beluga » et la boiserie « Madrona » (bois d’arbousier) dégage immédiatement un sentiment de luxe et de grande finition. Par nature, je n’aurais peut-être pas opté pour cette association et pourtant je me surprends à vraiment l’aimer.
Je me cale dans le siège et dès cet instant je finis d’être conquis : le confort est incroyable, plus encore lorsque je termine de jouer avec les réglages électriques du fauteuil. Il me reste une chose à faire : trouver un maximum de raisons pour y rester vissé le plus de temps possible! En parcourant du regard mon environnement, j’apprécie les divers petits détails qui font tout le charme de cet habitacle : les nervures du bois plaqué, les ouïes de ventilation très aéronavales, le levier de vitesse, le bouton de sélection de mode de conduite… et soudain, stupeur ! Horreur ! D’où viennent ces commodos ? Un seul mot me vient à l’esprit : « cheap ». Un détail sans gravité, j’en conviens, mais dans une automobile qui affiche un prix de tout juste moins de 200’000 Euros, la surprise frôle la frayeur !
Les technologies embarquées (infodivertissement et assistances à la conduite) se placent à un niveau que je qualifierais de supérieur bas. Certes, elles sont de très bonne facture, groupe VAG oblige, mais ne versent ni dans le remarquable, ni dans l’innovateur. Je regrette un poil l’aspect conventionnel aux touches trop « Volkswagen » de la console centrale, dissociant écran tactile et commandes de ventilation. Il semblerait que la donne change avec la dernière Continental GT, on ne manquera pas de le vérifier dans quelques jours.
Sous le capot
Là est le centre d’attention, la raison du « quoi », l’envie de réponse au « comment ? » : le V8 biturbo essence de quatre litres, provenant directement du cousin de groupe, le Porsche Cayenne de troisième génération. Il déploie sa puissance maximale de 542 ch à 6’000 tours/minutes, soit 107 de plus que le pendant diesel, et 770 Nm de couple entre 1’950 et 4’500 t/min, 130 Nm de moins que le V8 diesel, avec une plage d’efficacité plus haute mais aussi plus large.
En termes de performance, la mouture essence bat sa sœur roulant au « fioul » de 0.3 seconde sur le 0 à 100 km/h, en plus de revendiquer une vitesse de pointe de 290 km/h, soit un gain de 20 km/h comparativement à la cadette de la gamme.
Le réservoir permet de stocker 85 litres de benzine, ce qui autorise une autonomie de 745 kilomètres, selon la consommation combinée de 11.4 l/100 km annoncée par le constructeur. Cependant, après un peu plus de 725 kilomètres parcourus lors de mon essai, avec des trajets principalement sur routes cantonales, je note une consommation mixte de 12.8 litres aux 100 kilomètres.
Au volant
Comme dit plus tôt, le confort et l’adaptabilité des sièges vous donnent envie de trouver toutes les excuses possibles pour vous glisser derrière le volant ou poser sur un siège passager, quel qu’il soit. Quant aux plus réfractaires au voyage ou à la balade, ils finiront par céder sitôt la fonction massage activée. Cette option est purement diabolique !
Je suis surpris au démarrage par la discrétion du bloc, ayant connu des V8 bien plus tonitruants et plus expressifs. Il émet là un son rauque distinctif, très calfeutré à l’intérieur, davantage perceptible au dehors. Il me faut taper durement dans l’accélérateur pour l’entendre sortir de sa timidité et profiter de la mélodie alors que je conduis.
Les attributs du moteur en font un agrément de conduite formidable : avec pareil couple, bien que moindre que la déclinaison diesel, il est inutile de sortir le parpaing pour le loger sur la pédale de droite. Une tendre caresse, et je suis facilement catapulté sans délai hors des limites de vitesses. Une chose rendue plus aisée avec cet habitacle si bien isolé phonétiquement et ce châssis si bien suspendu, éléments qui trompent grandement le sentiment de vitesses des occupants, pour le plus grand bien du confort.
Quand bien même la dynamique est réelle, mon envie n’est pas à la conduite sportive, loin de moi la volonté d’attaquer chaque virage. Premièrement, en raison du poids : avec 2’388 kg à vide, je comprends très vite que l’engin n’apprécie que très moyennement mes vigoureux coups de volant alors que je gravis un col. Dès les premières vraies sollicitations, à vitesse encore modérée, les pneumatiques se mettent à crisser. Un soupçon de plus de gaillardise, et l’ensemble succombe carrément au sous-virage. La conclusion est nette et sans appel : j’aborde les virages dans la zen attitude, le coup de pédale attendra la toute fin du tournant. Deuxièmement, parce que la philosophie Bentley transpire à plein dans ce milieu très cosy. L’amortissement filtre une très grande partie des défauts de la route et le roulis y est quasi absent. Même les jantes de 21 pouces n’altèrent en rien le confort. On s’y sent alors comme dans un cottage anglais, par un jour d’automne brumeux. Assis au coin du feu, un verre de whisky à la main, pourquoi se presser ?
Verdict
La comparaison entre V8 essence et diesel est à mon sens vaine. Chaque mouture répond à des besoins et attentes spécifiques. Mais qu’est-ce donc ce Bentayga V8 essence ? C’est une alternative à l’exotique W12, une autre possibilité, plus sage, moins gourmande. C’est une réponse pragmatique de Bentley à la mode des SUV, dans le registre du luxe. Un mélange soigné et raisonnable de raffinement, de vélocité et de confort. And So British, my friend.
Prix et options – Bentley Bentayga V8
Prix de base : EUR 146’900.-
Peinture « Pale Sapphire », avec coloration du bas de caisse : EUR 5’610.-
Spécification « Tout-Terrain » : EUR 5’010.-
(Drive Dynamics Control avec réglages « ROC », Gestion des bagages, Caméra de vue de dessus avec rétroviseurs extérieurs à gradation automatique, Protections de châssis)
Spécification « Ville » : EUR 4’375.-
(Système « City Safeguard », Assistance au parking, Alerte piéton, Alerte au trafic arrière, Reconnaissance des panneaux de circulation)
4 sièges « Confort », avec console centrale arrière : EUR 8’760.-
Spécification « Touring » : EUR 6’260.-
(Régulateur de vitesse adaptatif, Système « Bentley Safeguard Plus », Afficheur tête haute, Assistance au maintien sur la voie, Système de vision nocturne, Système « Traffic Assist »)
Volant 3 branches, doubles teintes : EUR 365.-
Finition « Madrona foncé » : EUR 1’460.-
Tapis de sol avant et arrière : EUR 395.-
Panneau de façade en bois plaqué : EUR 510.-
Prise de recharge de batterie : EUR 105.-
Système d’infodivertissement arrière Bentley, avec « Maps » : EUR 5’960.-
Eclairage d’ambiance : EUR 375.-
Système d’infodivertissement central « Naim For Bentley » : EUR 6’685.-
Clef « Valet » : EUR 225.-
Spécification « Bentayga Blackline » (4) : EUR 5’250.-
(Finition « Black Gloss » des poignées de portes, des cadres de projecteurs avant et arrière, des tiges protectives latérales et arrière, du cadre de plaque d’immatriculation arrière, des rails de toit, des encadrements de fenêtres, des « Wing vent », de la grille de radiateur)
Jantes 21 pouces à 5 doubles branches, peintes en noir et chariotées au diamant : EUR 1’350.-
Prix TOTAL : EUR 199’595.- (prix CHF en fonction du cours EUR)
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Nos remerciements à Bentley Motors Limited pour le prêt de ce Bentley Bentayga V8, ainsi qu’au garage Bentley Lausanne à Crissier pour leur soutien logistique.
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