07 January 2015
2015-01-07
Récemment rafraîchie, la berline issue de la plateforme de la Continental passe à l’essai. A l’inverse de son aînée qui peinait à s’affranchir du lien de parenté avec le coupé « Conti », la Flying Spur nouvelle version abandonne son patronyme « géographique », s’offre en motorisation V8 et devient ainsi la berline d’accès au monde Bentley.
Texte et photos : Jérôme Marchon
Alors entendons-nous bien : le « B » ailé ne se met pas à faire du low-cost ; mais un rapide coup d’œil à la liste des prix de notre exemplaire d’essai me fait dire que la vénérable maison britannique, en affichant un prix de base de CHF 225’000.- pour son joujou, vient se placer en ligne de mire des très hauts de gamme allemands, Classe S et Série 7 en tête, à puissance plus ou moins équivalente. Et pourtant, des Flying Spur sur la route, on n’en croise pas des masses…
A l’extérieur
Une calandre plus verticale, une ligne plus élancée et mieux proportionnée, voici les quelques ingrédients qui permettent à la nouvelle mouture de la Flying Spur de définitivement s’affranchir de la tutelle du coupé Continental. Du moins dans la ligne.
Les ailes avant s’ornent de discrètes ouïes, dans l’esprit Aston Martin, mais affichant fièrement le « B » stylisé de Bentley. La ceinture de caisse haute ajoute au dynamisme tandis que sur les portières arrière se découpe un mouvement d’aile « à l’Italienne » venant muscler la poupe.
Le couvercle de malle, dans le prolongement de la ligne de toit fuyante, conclut une silhouette où malheureusement les feux tout de rouge parés semblent perdus dans la masse gris argent. Ce sera là mon seul petit regret, la face arrière se montrant lourde, certes synonyme de robustesse, mais presque négligée tant le reste de l’ensemble est réussi. Même avec près de 5.30 m de long et 2 m de large, la Flying Spur apparaît comme gracieuse à l’œil.
Signe distinctif de notre version V8, les sorties d’échappements sont en forme de 8 horizontal, alors que celles de la version W12 sont ovales. Avec le « B » sur fond rouge sur les insignes, ce seront les seuls moyens à votre disposition pour distinguer les deux motorisations.
A l’intérieur
L’entrée dans un intérieur Bentley demeure toujours une expérience unique. Et même si l’on a affaire à la « petite » berline de la gamme, elle n’en conserve pas moins tous les attributs des grandes.
Une fois les lourdes et épaisses portes tirées, c’est une orgie de cuir, chrome, bois précieux «piano black» et moquette épaisse qui s’offre à vous. Pas un mm2 de plastique en vue, si ce n’est les commandes sur la console centrale. Le dessin de la planche de bord est repris du coupé… Je ne lui en tiendrai aucunement rigueur, il est devenu au fil des ans la signature intérieure de la marque et les années ne lui portent aucun ombrage.
Les 3 m de l’empattement ne laissent aucun doute possible sur l’habitabilité proposée par notre belle anglaise. A tel point qu’elle s’offre même, contre supplément bien entendu, une configuration 4 places dotée de sièges arrière réglables.
Assis comme un nabab à l’arrière, je m’attarde un peu sur l’équipement. Bien que provenant intégralement de la banque d’organes Volkswagen, seules l’interface et la cartographie trahissent l’origine de l’instrumentation. Qu’à cela ne tienne, la technologie est éprouvée, fiable et réactive. On ne lui en demande pas plus.
Tout ce qui peut se mouvoir dans l’habitacle est motorisé. Les sièges, bien entendu, mais aussi les appuie-tête, le volant, le store arrière ou les ceintures de sécurité. Même la télécommande tactile pour les passagers arrière, permettant de piloter la climatisation bizone, le volet de custode et bien entendu le système multimédia avec écrans séparés et installation hifi Naim, s’extrait de son logement avec douceur dans un petit « wiiiizzzz » caractéristique. Pour les plus exigeants, sachez qu’un réfrigérateur placé dans la console sur le tunnel central est disponible en option. Par contre les geeks seront déçus par l’absence d’assistances à la conduite comme le head-up display ou les diverses alertes de franchissement de ligne, direction correctrice de trajectoire ou autres caméras surveillant le périmètre de votre limousine. Les Classe S et Série 7 restent devant sur ce point.
Il est évident que l’agencement, la qualité des matériaux et la finition ne souffrent d’absolument aucune critique. Petite mention personnelle pour les cendriers placés dans les portières… j’en aurais bien gardé un pour décorer mon salon tant la pièce est magnifique.
Sous le capot
Découvert sur la Continental GTC il y a quelques mois, c’est le bloc V8 biturbo de 4.0 l. de cylindrée d’origine Audi qui se charge de mouvoir les près de 2.4 tonnes de notre engin. Avec ses 507 CV et 660 Nm de couple, la puissance est suffisante pour animer la Flying Spur et ce même avec virilité lorsque l’envie vous en prend.
Cette cavalerie passe au sol sur les quatre roues via une boîte automatique à convertisseur et ses 8 rapports.
Linéaire et volontaire, ce moteur fait merveille également dans la Flying Spur et convient parfaitement aux attentes que l’on a de lui. Du côté de la consommation, j’aurai mesuré 14.7 l./100 km au terme de mon essai à la pompe. Ce qui reste tout à fait en ligne avec la moyenne constatée sur la Continental GTC.
Au volant
Fidèle à la tradition des limousines britanniques, le démarrage du V8 s’effectue dans un silence de cathédrale. Rien ne vient perturber la quiétude de ce cocon sur roues. Le pédigrée sportif de la marque n’est pas pour autant oublié… si l’on peut parler de sport. Les accélérations sont franches, faisant ressentir aux passagers la poussée dans le dos. Incongru ? Oui et non. Oui si l’on s’attend à un voyage au long court dans un calme serein, conduit par Nestor derrière le volant. Non dans l’hypothèse où ressentir une auto et ses performances, aussi grande et lourde soit-elle, participe aux plaisirs une fois aux commandes. Car la Flying Spur peut à la fois vous conduire et surtout être conduite !
Dès lors, les borborygmes et le feulement du V8 perceptibles en charge depuis l’habitacle font partie de l’ambiance et ne sont en aucun cas le signe d’une quelconque faiblesse dans l’insonorisation. Dans mes souvenirs, le W12 s’attèle à la tâche de manière plus discrète, mais avec une poussée bien plus velue. Voilà très certainement la grande différence entre les deux motorisations : le V8 s’exécute avec plus d’expression et de vie, là où le W12 se qualifie de « force tranquille ». D’ailleurs, en termes de performances pures, la différence sur le 0 à 100 km/h de 0.6 secondes (4.6 pour la W12 et 5.2 pour la V8) est presque anecdotique.
La suspension pilotée avale sans broncher la moindre imperfection de la route. Pour la forme, la fermeté est réglable au moyen du menu dédié de l’ordinateur de bord. Si les différences sont perceptibles, le mode « sport » conserve les qualités de confort inhérentes au positionnement de notre limousine. D’ailleurs la masse conséquence aura vite fait de calmer mes ardeurs dans les enchaînements rapides tant les mouvements de caisse provoquent presque la nausée. Sans parler de la direction totalement muette en remontées d’informations. Il n’en demeure pas moins que les capacités dynamiques de la Flying Spur sont de haut vol, souveraine et neutre même en la brusquant, exercice à contre-emploi dans lequel elle pourrait laisser présager de quelques lacunes.
Mais la Flying Spur est avant tout une avaleuse de goudron, qu’elle engloutit avec gourmandise dans un flegme digne de ses origines, une ambiance feutrée et hors du temps, le tout à une allure supersonique ! La vitesse maxi est annoncée à 295 km/h.
Verdict
Face à ses concurrentes précitées bardées de technologie, la Bentley Flying Spur semble d’une autre époque. Du coup, le tarif de CHF 225’000.- en base paraît indécent. Mais peu importe. Le charme, la présence et l’ambiance offerts par cette Lady justifient à eux seuls le sacrifice face à la froideur clinique des germaines. Les petits défauts se transforment en traits de caractère, chaque voyage devient un enchantement que l’on soit derrière le volant ou confortablement lové dans les sièges arrière. Merci à Bentley d’avoir réussi à conserver cette âme si particulière qui habite sa production.
Prix et options – Bentley Flying Spur V8
Prix de base : CHF 225’000.-
Roues à 6 rayons double peintes 21’’ : CHF 3’545.-
Toit ouvrant électrique : gratuit
Capuchon de réservoir en aluminium : CHF 285.-
Peinture métallisée Silver Frost : CHF 4’810.-
Emblème Bentley brodé dans les appui-tête : CHF 705.-
Configuration 4 places : CHF 4’250.-
Volant 3 branches en cuir : CHF 1’945.-
Moquette de coffre assortie à la couleur intérieure : CHF 600.-
Liseré en cuir sur moquette du coffre : CHF 110.-
Liseré en cuir sur moquette intérieure : CHF 245.-
Système audio « Naim » 1’100 W : CHF 8’195.-
Pack multimédia arrière : CHF 7’995.-
Régulateur de vitesse adaptatif : CHF 2’990.-
Climatisation arrière : CHF 900.-
Caméra de recul : CHF 1’330.-
Boîte à lunettes sur console centrale avant : CHF 680.-
Cendrier avant et arrière avec allume-cigare : CHF 485.-
Pack confort : CHF 2’560.-
(Ajustement électrique de la ceinture de sécurité, partie avant des sièges électrique, sièges avant et arrière avec ventilation et massage, réglage électrique du siège passager avant depuis le compartiment arrière)
Prix TOTAL : CHF 266’630.-
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Nos remerciements à Bentley Motors Limited pour le prêt de cette Bentley Flying Spur V8 ainsi qu’à l’agence Bentley Genève pour la logistique.
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