09 August 2012
2012-08-09
Le Jeep Grand Cherokee est sous nos latitudes l’un des symboles de l’automobile américaine et tous ses excès. Mais dans notre ère « green », a-t-il encore sa place ? Wheels And You a pris le volant de la dernière version dans sa finition Overland cachant sous son capot un V6 diesel d’origine… transalpine.
Texte : Sébastien Morand / Photos : Bob de Graffenried
La Jeep est une icône de l’automobile depuis le débarquement des alliés sur les côtes normandes. Et même si depuis beaucoup d’eau a coulé sous les ponts, le mythe américain fait toujours rêver. La Willys n’est plus là, elle a évolué en plusieurs étapes vers l’actuelle Wrangler. Il y a eu le Cherokee, développé en 1983 par AMC, alors propriété de Renault, et depuis sa présentation en 1992 au Salon de Detroit, il y a le Grand Cherokee. C’est sous le contrôle de Chrysler, passé depuis dans le giron de Fiat, que ce SUV haut de gamme a vu le jour avec comme objectif de concurrencer le Range Rover. Luxueux, spacieux et capable de sortir des sentiers battus, le Grand Cherokee première génération a envahi les routes dès 1993 avec un succès retentissant, principalement dans sa finition Limited dont le nom vous rappellera sûrement quelques souvenirs. Pour ma part, je garde en mémoire le modèle équipé du V8 5.9 l. qui proposait une sonorité unique très plaisante. Aujourd’hui, même si le traditionnel moteur V8 essence existe toujours au catalogue, le politiquement correct est de rigueur et c’est dans sa déclinaison diesel que nous prendrons les commandes de la quatrième génération du Grand Cherokee.
A l’extérieur
Si en vingt ans le style n’a pas drastiquement changé, il faut reconnaître qu’il a fière allure ce nouveau Grand Cherokee. Très élégant, imposant sans être gros, il dégage une image sûre de lui et affirme sa présence sur la route. Nous retrouvons la calandre chromée avec ses sept ouïes d’entrée d’air comme c’est le cas sur toutes les générations de Grand Cherokee. Les projecteurs plutôt modernes surplombent l’immense pare-chocs intégrant les antibrouillards tandis que les crochets de remorquage accentuent l’image « baroudeur » et le radar de distance du régulateur de vitesse rappellent ses capacités de « routière ». Le capot nervuré affine un peu l’ensemble qui est très anguleux, voire brut. Avec ses passages de roues carrés et une ligne globalement droite et simple, les designers n’ont pas cherché à révolutionner le dessin mais plutôt garder l’identité du Grand Cherokee tout en lui donnant un look plus actuel. Associée à la couleur blanche de notre voiture d’essai, l’utilisation du chrome en quantité, comme l’immense bande située entre les feux arrière et les énormes jantes 20″ lui ajoute un côté bling-bling typiquement US. J’ai d’ailleurs croisé quelques Grand Cherokee dans des teintes foncées, noir ou gris, lui conférant plus d’élégance. Extérieurement, à l’exception des grandes jantes polies et du petit logo Overland sur la malle arrière, rien ne permet de différencier cette finition haut de gamme du reste de l’offre.
A l’intérieur
C’est tout l’inverse à l’intérieur. Le luxe à l’américaine s’affiche clairement dans un goût, qui je dois reconnaître, ne m’a pas totalement convaincu. Mais c’est bien évidemment un avis très personnel. Les sièges et les contre-portes sont habillés d’un cuir couleur caramel de très bonne qualité. Le tableau de bord est recouvert de cuir noir avec des surpiqûres caramel, souligné par divers placages en vrai bois, plus un peu d’aluminium et de chrome par-ci par-là. L’ensemble m’a laissé un peu perplexe surtout du fait de la teinte extérieure du véhicule. Peut-être qu’avec un coloris plus foncé, noir par exemple, il aurait eu plus de gueule. Passons sur ces détails subjectifs et attardons-nous sur l’intérieur de notre salon roulant. Eh oui, avec autant de cuir et de bois, on pourrait se croire dans un château. D’ailleurs au vue de la production automobile actuelle, l’ergonomie et l’apparence de l’espace à bord est relativement austère, voire vieillotte malgré la finition luxueuse, un peu comme une bâtisse ancienne. Mais encore une fois, les traditions peuvent avoir du bon et sans bousculer les genres, on se sent à l’aise dans cet intérieur cosy et chaleureux. Le volant à jante très épaisse, presque un peu trop si Madame emprunte votre voiture, est lui aussi recouvert de bois et de cuir. La qualité des matériaux utilisés est aussi en nette amélioration par rapport à la version précédente. Le constructeur a bel et bien fait un effort pour se battre à armes égales avec les concurrents allemands et anglais. La vision extérieure est excellente et l’assise est confortable, les kilomètres s’avaleront sans souci à bord de ce nouveau Grand Cherokee. Vos passagers seront tout aussi à l’aise tant l’habitabilité est exemplaire pour la catégorie et l’immense coffre de 782 litres au hayon à commande électrique pourra accueillir sans peine les bagages de toute la famille. Sa capacité passe à 1’554 litres si vous rabattez la banquette arrière. Confort et luxe sont bel et bien au rendez-vous, sans oublier la technologie, bien évidemment. Mais encore une fois, en comparaison avec la concurrence, le tout semble un peu dépassé même si au niveau de la richesse il répond aux mêmes attentes avec par exemple un radar de distance, une caméra de recul, un module GPS intégré et un détecteur d’angle mort. J’émettrai quand même une réserve tant sur la réception FM que j’ai trouvé particulièrement mauvaise, à croire que les intervalles de fréquence US étaient encore programmées sur cette voiture, que sur l’interface globale GPS/ordinateur de bord/Hifi, qui, ô surprise, est emprunté pour l’occasion à la Ferrari California (!), mais dont l’ergonomie générale demeure archaïque et fort peu intuitive.
Sous le capot
Point de gros V8 essence pour cet essai, mais un V6 3.0 turbo diesel d’origine italienne qui développe la puissance intéressante de 241 CV pour un couple de 550 Nm. Dans la version de base appelée Laredo, le même moteur propose une puissance de 190 CV et c’est uniquement sur les finitions Limited ou Overland, celle de notre essai, qu’il atteint 241 CV. Certes j’aurais préféré le modèle SRT8 avec son V8 6.4 de 468 CV, mais il faut bien reconnaître que dans l’environnement actuel, le diesel est nettement plus approprié à un tel véhicule. Un peu bruyant au démarrage, ce moteur sait se montrer relativement discret une fois lancé. Très coupleux, il répond à la moindre sollicitation de la pédale d’accélérateur, quelle que soit la configuration de la route. En ville, il est suffisamment souple pour évoluer en toute quiétude malgré la masse imposante de la voiture. La boîte automatique cinq rapports est un peu dépassée mais on nous annonce l’arrivée prochainement d’une nouvelle boîte à huit rapports. Malgré sa sonorité « agricole », ce nouveau Grand Cherokee est un bon cheval, disponible et efficace en toutes circonstances. Niveau consommation, si le constructeur nous promet une moyenne de 8.3 l./100km en utilisation mixte, j’aurai mesuré tout au long de mon essai une moyenne de 10.4 l./100 km. Certes en habitant en moyenne altitude, 860 mètres pour être précis, je sollicitais franchement les ressources de ce Grand Cherokee à chaque fois que je remontais chez moi. J’ai pu par ailleurs noter que l’ordinateur de bord était plutôt précis puisque ce dernier affichait seulement 0.2 litre de moins que ce que j’avais mesuré à la pompe. En tenant compte de cette petite marge d’erreur, j’ai pû noter une consommation sur autoroute de seulement 7.5 l./100 km soit quasiment les valeurs annoncées (7.2 l./100 km en extra-urbain) et avec un peu de ville et de campagne, la moyenne dépassait tout juste les 9.0 l./100 km, un chiffre finalement plutôt proche de la consommation mixte donnée.
Au volant
Avec son aspect et sa mécanique un peu brut de décoffrage, voyons ce que nous réserve ce Grand Cherokee au moment d’attaquer l’asphalte. Les premiers kilomètres sont un peu déconcertants tant la voiture est grande pour notre environnement routier loin des grands espaces américains. Mais finalement une fois la taille assimilée, ce Grand Cherokee se comporte parfaitement bien. Très maniable, je me serai même surpris à aller le parquer dans les souterrains de nos villes sans m’inquiéter. La position de conduite très haute offre une très bonne visibilité. Le confort et l’efficacité en toute circonstance sont ses marques de fabrique, quelles que soient les conditions météo ou l’état de la route. Rien ne vous arrêtera aux commandes de ce mastodonte « Made in USA ». La suspension pneumatique Quadra-Lift permet de réguler la hauteur de caisse soit en l’abaissant pour améliorer les performances sur autoroute soit en l’augmentant pour du franchissement. Je n’ai toutefois pas testé les aptitudes offroad, mais au vue de l’histoire de la marque et de son système quatre roues motrices Quadra-Trac, je ne doute pas de ses compétences tout en sachant que très peu, voire aucun propriétaire de Grand Cherokee ne s’aventurera dans le terrain. Sur le bitume, c’est dans un confort princier que je parcourrai la Suisse Romande par monts et par vaux. De plus, à l’instar des systèmes que nous pouvons retrouver chez Land Rover ou Toyota, le Grand Cherokee est équipé d’un sélecteur Selec-Terrain réglable en fonction du type de route selon cinq modes (Auto, Snow, Sport, Sand/Mud et Rock). Bref, il n’y a qu’au moment d’attaquer des routes sinueuses que le poids de la bête, tout de même 2’430 kg, se fera ressentir dans le comportement routier. Bien évidemment ce Grand Cherokee n’est pas une sportive et compte tenu de son envergure c’est plutôt logique, mais habitué à des voitures moins sensibles à la prise de roulis, il m’aura fallu modérer les ardeurs de ma conduite lorsque les virages se resserrent. Encore une fois, l’objectif d’un Grand Cherokee n’est pas de taquiner les motards sur les virolets de notre relief et pour une utilisation urbaine et extra-urbaine, le feeling de conduite est plutôt excellent.
Verdict
Depuis le lancement du premier Grand Cherokee il y a bientôt 20 ans, la concurrence a réagi, surtout les marques allemandes et maintenant la clientèle de 4×4 haut de gamme a pléthore de choix. Mais l’américain garde une touche de tradition qui fait encore la différence pour certains, au même titre qu’un Range Rover dans un autre registre. De plus, avec son tarif plutôt intéressant par rapport aux SUV européens, accentué encore par la prime Bonus Dollar, le Grand Cherokee se démarque avec son look de baroudeur BCBG faisant de lui une alternative intéressante à l’armada de tout-terrain de luxe qui envahit nos routes.
Prix et modèles – Jeep Grand Cherokee 3.0 CRD
Modèle de base Laredo, avec le V6 3.0 CRD de 190CV : CHF 63’500.-
Modèle avec finition Limited et V6 3.0 CRD de 241 CV : CHF 69’950.-
Modèle avec finition Overland et V6 3.0 CRD de 241 CV : CHF 80’850.-
./. Bonus Dollar : CHF -10’000.-
Prix TOTAL du véhicule essayé : CHF 70’850.-
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Nos remerciements à Fiat Group Automobiles Switzerland SA pour le prêt de ce Jeep Grand Cherokee 3.0 CRD Overland.
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