Essai – Bentley Flying Spur V8 : Le « petit » salon sur roues

Avec la fin annoncée du navire amiral Mulsanne, Bentley présente le renouvellement de sa Flying Spur. Dotée du nouveau V8, la marque de Crewe rafraichit un modèle qui aura la lourde tâche de devenir la seule limousine de la marque.

  • V8 essence, biturbo, 3’996 cm3
  • 550 ch à 6’000 t/min
  • 770 Nm de 2’200 à 4’500 t/min
  • Boîte de vitesses double-embrayage, 8 rap.
  • Vitesse maxi : 318 km/h
  • 0 à 100 km/h en 4.1 sec.
  • Poids : 2’330 kg
  • Long./larg./haut. (mm): 5’316 x 2’013 x 1’483
  • Conso. mesurée : 13.2 l/100 km
  • Emissions CO2 : 270 g/km (E)
  • dès EUR 162’300.-, mod. essayé EUR 235’515.-


Texte et photos : Tony da Silva


Chez Bentley, il y a deux segments qui connaissent le succès : la Continental, avec plus de 50% des ventes et dont nous vous proposerons prochainement l’essai de la déclinaison GTC V8, et le SUV, nommé Bentayga, en croissance de 18% entre 2019 et 2020. Le reste, ce sont deux limousines qui historiquement occupent le terrain dans des styles très différents.

En condamnant la Mulsanne au style très particulier, la marque prend un risque mesuré et mise tout sur la Flying Spur à un moment critique. En effet, alors que l’année 2020 a été fortement touchée par la pandémie et que l’usine a dû fermer pendant sept semaines, Bentley a annoncé un record au niveau de ses ventes en 101 années d’existence : 11’206 véhicules.

A l’extérieur

Le style Bentley est reconnaissable au premier coup d’œil avec une face avant caractéristique et massive. Loin de rechercher le style le plus profilé possible, les designers ont opté pour une calandre pratiquement à la verticale et, avec une finition « Black Gloss », impossible de passer inaperçu.

Sur le côté, le constructeur a fait de son mieux pour alléger les 5.3 mètres de long et cette arête dans le prolongement de la porte arrière améliore grandement les chose en rappelant la mythique hanche de la Continental GT. Enfin, l’arrière, les feux constituent une signature du fameux B de Bentley.

Équipée de jantes 21 pouces montées avec des pneumatiques hivernaux de 265/40 à l’avant et 305/35 à l’arrière, notre « lady » peut affronter toutes les conditions météorologiques grâce à sa transmission intégrale.

A n’en pas douter, la présence de cette Flying Spur sur la route est manifeste grâce à des éléments prononcés et renforcés par des options exubérantes. Par exemple, ces jantes de grande taille ou des finitions parfois un peu ostentatoires.

A l’intérieur

Si certains signes extérieurs semblent un peu tapageurs, à l’intérieur c’est une autre histoire. Notre modèle offre un traitement très classique avec un bois de noyer au style immaculé pour le tableau de bord. Au niveau du matériau de recouvrement, les sièges ainsi que les panneaux de porte sont habillés d’un cuir bleu-gris baptisé Brunel avec une nouvelle finition du plus bel effet : capitonnage incurvé alliant broderie et surpiqûres formant des losanges sur l’ensemble des surfaces.

Les sièges sont énormes et, bien entendu, ils offrent une assise parfaite et hautement personnalisable via 24 options de réglage (chauffage, ventilation, massage, etc.). Les accoudoirs ne sont pas en reste puisque pour la première fois de ma « carrière », le chauffage des sièges est étendu sur l’accoudoir central et latéral, un détail appréciable en plein hiver.

A l’arrêt, la planche de bord semble être constituée d’une seule pièce de bois, mais dès que je démarre le véhicule, le centre du tableau de bord bascule sur lui-même et laisse apparaître un écran tactile de 12.3 pouces. Idem derrière le volant totalement opaque et qui s’illumine avec une interface digitale très léchée pour afficher tous les éléments essentiels à la conduite comme le compteur de vitesse, les tours/minutes ou la capacité du réservoir.

Bref, il faudrait quelques pages pour tout décrire et, à ce stade, vous l’avez compris, tout ou presque appel au luxe, à la qualité et à un agencement parfait. La « seule » entorse à l’histoire Bentley se trouve sur les baies de ventilation au centre car, écran oblige, le constructeur a développé des grilles rectangulaires teintées en noir à l’inverse des classiques bouches rondes chromées qui pourtant sont restées présentes sur les côtés.

Le volume intérieur est vaste et la voiture est livrée avec cinq places ainsi qu’un réfrigérateur pour deux bouteilles… ce dernier ne permet pas d’avoir de trappe à ski ou de rabattre les sièges arrière malheureusement.

Sous le capot  

Cette « petite » Flying Spur est donc équipée du V8 biturbo de 3’996 cm3 et les spécifications sont au rendez-vous : 550 ch à 6’000 t/min et 770 Nm entre 2’000 et 4’500 t/min.

Malgré les 2.3 tonnes de la voiture, ces caractéristiques permettent de catapulter notre limousine de 0 à 100 km/h en 4.1 secondes et d’atteindre une vitesse de pointe de 318 km/h.

La transmission intégrale contrôle en permanence le niveau d’adhérence de chaque roue et la boite ZF à double embrayage offre 8 rapports. Détail cocasse, la vitesse maximale est atteinte en 6ème alors que les 7ème et 8ème vitesses ne sont utilisées que pour des gains de consommation et c’est notable : à 120 km/h sur le dernier rapport, le moteur ronronne à peine à 1’500 t/min.

Enfin, le poids et les performances ont bien entendu un impact sur la consommation et là, pas de miracle. Sur près de 500 kilomètres (80% autoroute), la consommation mixte s’arrête à 13.2 l/100km mais lors d’un parcours urbain, la valeur mesurée est supérieure à 20 l/100km. Ceci dit, sur un tronçon purement autoroutier d’environ 80 kilomètres à une moyenne de 100 km/h, la consommation s’établit à 9.1 l/100 km grâce à la désactivation de 4 cylindres sur les 8.

Au volant

S’installer derrière le volant est aisé car le siège se positionne automatiquement en retrait pour pouvoir faciliter l’accès au véhicule. A vrai dire, les assises sont des fauteuils avec leurs 24 réglages et, à l’arrière, le coussin pour la tête est un véritable petit oreiller.

La grande planche de bord avec l’écran caché fait immédiatement penser aux anciennes Bentley avant que l’électronique ou les boutons envahissent tout. L’ensemble est luxueux au possible et tous les éléments sont parfaitement agencés en offrant une belle cohérence.

Comme toujours avec ce genre de véhicule, si le moteur au démarrage émet un son à peine perceptible, il faut regarder le compte tour pour savoir si le moulin est allumé ou non car à 1’000 t/min, c’est impossible de le distinguer. Le seul bruit qui retentit vraiment fort, c’est le clignotant et la musique provenant des 19 haut-parleurs amplifiés par 2’200 watts sur 20 canaux du système Naim. Là aussi pas grand-chose à redire sur une installation qui permet de multiples réglages et qui d’office offre un son rond et cristallin sur l’ensemble du spectre musical.

Bref, il est temps de rouler et là, première surprise : dès que la pédale de frein est lâchée, la voiture se met délicatement en mouvement et une très douce caresse sur l’accélérateur suffit à ébranler notre limousine dans une légèreté aussi silencieuse que linéaire. Par contre, dès que le pied se fait plus lourd sur l’accélérateur, alors là c’est comme si les turbos se chargeaient brièvement et donnait une large bouffée dans les bronches du moteur et ça donne presque le sentiment de conduire une voiture électrique avec un couple monstrueux, 770 Nm dès 2’000 t/min. Si sollicité sans ménagement, le couple est tellement brutal qu’il débarque et donne l’impression de se retrouver dans un dragster molletonné. Un démarrage rapide ou un dépassement véloce sont réalisés un clin d’œil et, avec l’insonorisation, il faut faire attention car très rapidement, la voiture franchit les limites légales de vitesse.

Sans rentrer dans tous les détails, les réglages sont nombreux et, en mode Sport, la limousine se montre très réactive et prête à brûler très rapidement les 90 litres d’essence contenus dans le réservoir. Ce n’est qu’à partir de 4’500 t/min que l’engin se fait réellement entendre jusqu’à 6’000 t/min dans une sonorité qui reste très « British », soit discret et légèrement rauque. Et que dire du comportement routier ? Avec le monde Confort, sur autoroutes ou routes nationales, notre paquebot de 5.3 mètres flotte sur l’asphalte comme si j’étais à bord d’un aéroglisseur. Tous les défauts ou raccords de la route sont gommés par les suspensions et le châssis. Rien, ou presque, ne vient perturber les occupants et les freins en fonte de 420 mm à l’avant et 380 mm à l’arrière se montrent progressifs et endurants.

Ceci dit, est-ce que cette grande berline peut être un peu brutalisée ? Montée avec des pneus d’hiver et une météo qui ne dépasse pas les 5 degrés durant toute la durée de l’essai, je ne veux pas prendre trop de risques, mais avec l’arrivée de la neige, je ne peux m’empêcher de faire un petit tour sur le manteau blanc. Et là, les qualités deviennent un peu des défauts car tout est tellement filtré que c’est difficile, pour ne pas dire impossible, de jauger des limites… mais jouer dans la neige reste toujours un plaisir d’enfant jamais égalé, même à un âge avancé !

Verdict

Cette nouvelle Bentley Flying Spur tient son rang, mais les dimensions peuvent s’avérer un peu « grandes » dans nos rues et nos villes qui n’ont pas été créées pour des voitures de cette taille. La consommation est également un détail sur lequel quelques clients à la fibre écologiste pourraient s’émouvoir, mais l’essentiel n’est pas là.

Avec cette Flying Spur, Bentley perpétue un savoir-faire centenaire avec des matériaux nobles et l’agencement à la main de 350 pièces en cuir (14 couleurs) cousues avec 3 km de fil via 140 personnes. Alors qu’une voiture « classique » est réalisée en une quinzaine d’heures, il faut entre 300 et 400 heures pour une Bentley. Tout cela a un coût et certains composants viennent directement des autres marques du groupe ce qui, pour la partie infotainment par exemple, n’est pas si exclusif (dommage).

La classique limousine ou trois corps reste une valeur sûre dans l’univers du luxe et des clients qui se déplacent, avec un chauffeur ou non. Bien entendu, pour rentrer dans cet univers, il faut débourser EUR 162’300.-, plus EUR 70’215.- d’options pour notre voiture d’essai, soit EUR 232’515.-. Pour ceux qui veulent le summum ou qui trouvent ce V8 un peu juste, il reste là version W12 avec des spécifications encore plus impressionnantes. Tout cela en attendant une version électrifiée car la marque vient d’annoncer une nouvelle version hybride pour la dernière génération du Bentayga avec une autonomie tout électrique d’environ 50 km.

Prix et options – Bentley Flying Spur V8

Prix de base : EUR 162’300.-

Peinture métallisée Camel : EUR 4’660.-

Mulliner Driving Specification with 22″ Black Painted Alloy Wheel : EUR 14’545.-

Finition “Côtes de Genève » pour console centrale : EUR 1’850.-

Finition bois Crown Cut Walnut : EUR 4’100.-

Finition des coutures Camel : EUR 1’950.-

Spécifications « City » : EUR 4’060.-
(coffre électrique, lecture panneau, etc.)

Spécifications « Touring » : EUR 6’415.-
(vision nocturne, vitesse adaptée, etc.)

Spécifications « Mood Lighting » : EUR 1’925.-

Illuminated Flying B Radiator Mascot – Black Gloss : EUR 3’685.-

Toit ouvrant et rideaux pour vitres arrière : EUR 2’525.-

Spécification Black Line : EUR 3’590.-
(cuvelages des feux, échappement, etc.)

Éclairage des bas de porte : EUR 830.-

Bentley Dynamic Ride sur quatre roues motrices : EUR 5’795.-

Frigidaire dans la banquette arrière : EUR 1’830.-

Clé pour valet : EUR 230.-

Système Naim : EUR 6’660.-

Chargeur portable par induction : EUR 290.-

Écran tactile rotatif : EUR 4’820.-

Prix TOTAL : EUR 232’515.- (prix CHF en fonction du cours  EUR)

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Nos remerciements à Bentley Motors Limited pour le prêt de cette Bentley Flying Spur V8, ainsi qu’au garage Bentley Genève – André Chevalley S.A. à Cointrin/Genève pour leur soutien logistique.

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