18 July 2011

Face à une concurrence toujours plus féroce, Ferrari n’avait d’autre choix que réagir avec véhémence pour conserver sa suprématie sur le marché des sportives. Nos impressions.

  • V8, 4’499 cm3
  • 570 CV à 9’000 t/min
  • 540 Nm à 6’000 t/min
  • Boîte de vitesses double embrayage, 7 rap.
  • Vitesse maxi : 325 km/h
  • 0 à 100 km/h en 3.4 sec.
  • Poids : 1’380 kg
  • Conso. mixte : 13.7 l./100 km
  • Emissions de CO2 : 307 g/km (G)
  • dès CHF 285’000.-
    modèle essayé : CHF 316’265.-

 


Texte : Jérôme Marchon / Photos : Claude-Alain Ferrière


Il incombe donc à la 458 Italia d’incarner la fierté conjointe de la marque et son pays, de par son nom, et mettre à genoux la concurrence. Mission pour le moins délicate et périlleuse lorsque l’on sait que Zuffenhausen, les voisins de Sant’Agata et les petits nouveaux de Woking mettent tout en œuvre pour ravir la place de leader détenue par la maison de Maranello.

Il est 17h15. Je coupe le contact devant le quartier général européen de Ferrari et le huit cylindres se tait. Seuls le souffle des ventilateurs expurgeant à pleins poumons les calories du compartiment moteur et les craquements de l’échappement brûlant viennent troubler cette fin d’après-midi estivale. Sonné comme un boxeur, mon esprit peine encore à assimiler cette nouvelle expérience automobile, mais une chose est cependant certaine : avec la 458 Italia, nous avons touché le summum, le pinacle, le graal, la quintessence de la production automobile actuelle. Et les jurés des différents concours auxquels la belle Italienne a pris part ne s’y sont pas trompés lorsque l’on regarde son palmarès. Dernier en date, en mai 2011, le jury du « International Engine of the Year 2011 » a décerné à la Ferrari 458 les prix du « Best Performance Engine » et « Best Engine above 4.0 liters ».

 

L’extérieur

Si ses proportions sont quasi identiques à celles de la F430 à qui elle succède, l’empattement plus long et les porte-à-faux réduits rendent la 458 imposante. Même si son esthétique m’a quelque peu dérouté lors de sa présentation, je dois bien avouer être tombé sous son charme et ébloui par ce jaune Modena qui lui sied à merveille. Il y a très longtemps qu’une Ferrari ne m’avait pas autant intimidé.
Certains trouvent que le dessin de Pininfarina manque de classe et d’inspiration ; bon, d’accord, la 458 Italia ne transpire peut-être pas l’élégance d’une 550 Maranello ou l’agressivité si savamment dosée de la 599 GTB Fiorano. Ceci étant, en y regardant de plus près, le physique de la berlinette recèle quelques courbes magnifiques suivant le point de vue. L’ensemble respire la puissance, comme le galbe de l’aile arrière plongeant sur les portières, la nervure centrale sur le capot ou encore le discret double bosselage du toit. L’arrière, massif, s’inspire clairement de l’Enzo tandis que les triples sorties d’échappement sont un hommage évident à la mythique F40. L’avant est par contre plus audacieux; conçu, comme le reste de l’auto, pour un rendement aérodynamique optimal, il s’orne dans sa partie basse d’une grande bouche noire cachant, derrière deux moustaches souples, les grilles d’aération. De part et d’autre du capot, prennent place les projecteurs qui sont eux-mêmes surmontés de très décriées « guirlandes » de LEDs remontant loin sur les ailes. En réalité, l’aérodynamisme a été le plus gros chapitre du cahier des charges. Afin de garantir les meilleures performances dans ce domaine, ce sont plutôt la science et la technologie, voire la balistique, qui ont dicté le style. Oui, les signes distinctifs courants permettant d’identifier une Ferrari de face ont disparu. Mais il n’est pas, pour autant, nécessaire de jeter l’opprobre sur une réalisation, qui, pour ma part, est convaincante. Il faut aussi dire que les critiques les plus acerbes sur le style de la 458 émanaient des tifosi, alors que les personnes d’autres provenances adhèrent davantage à ce style nouveau. Et Ferrari, nous le savons tous, compte sur les « nouveaux marchés » pour continuer son développement.
En définitive cette 458 demeure une vraie Ferrari de part son style inimitable, un look ravageur et un regard de reptile intimidant, prêt à vous bondir dessus et laisser s’exprimer ses atouts. La F430 a pris, au passage, un sacré coup de vieux !

 

L’intérieur

L’audace stylistique a également envahi l’habitacle. Puisant son inspiration dans la Formule 1, l’interface homme-machine se veut révolutionnaire et au plus près du pilote. Ainsi, le volant intègre le célèbre Manettino, forcément, mais également les commandes des clignotants, des phares, des essuie-glaces et des suspensions pilotées. Au sommet de la couronne s’affichent les diodes rouges en fonction du régime, vous indiquant de passer le rapport de vitesses supérieur. Si l’aspect intuitif de cette disposition n’est de loin pas une évidence, les automatismes à l’utilisation des clignotants, par exemple, s’acquièrent finalement assez vite ; même si en fin de journée, dans la circulation urbaine assez dense et nécessitant toute ma concentration, ma main gauche allait toutefois chercher un commodo de clignotants inexistant. La colonne de direction n’accueille plus que les palettes de changement de vitesses. La planche de bord adopte un design pour le moins torturé et futuriste, notamment avec les buses d’aérations entourant l’instrumentation. La finition frise une perfection à laquelle la marque ne nous avait guère habitués avec un habillage de l’habitacle en cuir surpiqué du plus bel effet et des ajustements quasi parfaits.
Les sièges baquets en cuir sont comme toujours confortables mais manquent singulièrement de maintien latéral lors de passages en courbe à haute vitesse. La position de conduite est trouvée aisément mais j’ai toutefois noté une posture plus allongée qu’à l’accoutumée.
Face au conducteur, l’énorme compte-tours est le dernier témoin de l’ère analogique avec sa grosse aiguille. Pour le reste, Ferrari a opté pour une instrumentation électronique avec à droite un écran affichant au choix l’indicateur de la vitesse numérique ou imitant un traditionnel tachymètre ainsi que les données du GPS et à sa gauche un écran qui détaille les jauges diverses ainsi que l’ordinateur de bord résumant entre autres les réglages choisis via le Manettino. En outre, la 458 inaugure un nouveau logiciel d’assistance dynamique du véhicule (VDA). Grâce aux senseurs de pression des pneus, de la température d’eau et d’huile du moteur et du différentiel et ceux de l’ABS, ce programme est capable d’interpréter en temps réel l’état de santé de la mécanique, selon trois niveaux. Le premier, « Warm Up » prévient que les organes de l’auto ne sont pas encore arrivés à température. Le second, « Go », indique qu’ils ont atteint leur optimum de fonctionnement et que vous pouvez « taper dedans ». Enfin, « Over », vous prie instamment de mettre fin aux réjouissances afin de ménager votre monture.
L’habillage noir du cockpit, les faibles surfaces vitrées et la sophistication de l’instrumentation électronique donnent l’impression d’avoir pris place à bord d’un avion de chasse dernier cri pour partir à l’assaut de l’asphalte.

 

Sous le capot

Ce nouveau V8 de 4’499 cm3 est en réalité un réalésage du bloc 4.3 litres de la California. Il adopte, pour favoriser la compression, une injection directe. Les chiffres sont absolument déments pour une motorisation atmosphérique : 570 CV à 9’000 t/min (dont 5 CV de suralimentation dynamique générée par la surpression naturelle dans les conduits d’admission d’air), 540 Nm de couple maxi à 6’000 t/min dont 80% est disponible dès 3’250 t/min et un rupteur qui s’actionne à 9’500 t/min. Le moteur de la Ferrari 458 Italia offre donc une puissance spécifique de 127 CV/litre, un record, détrônant au passage l’inoubliable VTEC de la Honda S2000 et ses 120 CV/litre. Allez, encore une petite rasade chiffres : le rapport poids/puissance est annoncé à 2,42 CV/kg, le 0 à 100 km/h en 3,4 secondes et surtout un temps de 20,3 secondes au 0-1000 m départ arrêté.
La chasse au moindre centième a cependant fait une victime collatérale : la boîte de vitesses manuelle et sa mythique grille. En effet, la Ferrari 458 Italia n’est disponible qu’avec la boîte à double embrayage sept rapports, développée par Getrag, que l’on retrouve également sur la California. La gestion électronique a cependant été revue, tenant compte des aptitudes dynamiques de la berlinette. Crime de lèse-majesté ? Il y a quelques années je vous aurais dit oui, sans hésiter. Il en est tout autrement aujourd’hui. Etant certainement la meilleure boîte de ce type sur le marché, elle permet une exploitation optimale de la puissance de feu du V8. La plage d’utilisation du moteur semble infinie et des relances foudroyantes sont garanties sur les sept rapports. Mais rassurez-vous, l’ensemble sait également se faire doux comme un agneau. L’onctuosité du moteur et la gestion parfaite du mode automatique de la boîte garantissent à la 458 d’évoluer sur un filet de gaz en ville en toute quiétude. Les rapports s’enchaînent avec fluidité dès 2’000 t/min tandis que la sonorité de l’échappement reste discrète.
Autre exploit, sur le plan environnemental celui-là : Ferrari annonce un taux de rejet de CO2 de 307 g/km ainsi qu’une consommation moyenne de 13.7 l./100 km. Qui l’eût cru ? Un effort particulier a été fourni par les ingénieurs motoristes sur la réduction des frottements à l’intérieur du moteur pour atteindre ces valeurs, qui restent malgré tout hypothétiques car dépendantes d’un type de conduite inhibant les qualités intrinsèques de notre missile sol-sol.

 

 

Sur la route

Pression sur le bouton « Start ». Tapis dans mon dos, le V8 s’ébroue dans un râle puissant. Le ton est donné. J’engage le premier rapport et m’élance sur la route. Très vite je prends mes aises au volant et la 458 se faufile sans aucune difficulté dans la circulation. Les regards des passants s’attardent sur nous, un petit signe de la main par ici ou un pouce levé par là ; la belle ne laisse indifférent sur son passage. L’occasion également de constater que la berlinette s’avère plutôt confortable, absorbant avec facilité les irrégularités de la chaussée.
Les affres urbaines éloignées, j’arrive sur le terrain de jeu favori de ma monture, les rubans de bitume. C’est l’occasion de mesurer de quoi est réellement capable la 458 Italia.
L’absence totale d’inertie du moteur est tellement impressionnante que mes réflexes se voient anesthésiés et un large sourire envahit mon visage. Pied au fond, première, deuxième, troisième, les rapports s’enchaînent sans aucun temps mort ni interruption de couple alors que l’octuor hurle à pleins poumons. Première gifle sur la joue gauche. Toute la mécanique travaille de concert, en parfaite symbiose. Les diodes sur le volant s’allument une à une, 1-2-3-4-5. Toutes clignotent  frénétiquement à l’approche de l’interdit… les 9’500 t/min ; pichenette de la main droite sur la palette adhoc, la quatrième claque dans un vacarme apocalyptique de l’échappement. Seconde gifle sur la joue droite. Pfiou ! Ca envoie, mais le plat de résistance est à venir : le châssis.
Bâti en aluminium, Ferrari annonce une rigidité supérieure de 20% par rapport à la F430. Les suspensions avant sont à triangles superposés tandis qu’à l’arrière une architecture multibras a été adoptée. Pour faire simple, l’efficacité est au rendez-vous : point de roulis ni de sous-virage et une réactivité exacerbée. Je fais corps avec la machine. D’une précision chirurgicale et très directe, la direction place la voiture quasi instinctivement pile-poil où je regarde, sans aucun flottement. Il n’y a que la négociation des épingles qui nécessitent plus d’un demi-tour de volant, sinon tout le reste se fait les mains scotchées à 9h15. Le train avant croche comme rarement vu et ne montre aucune faiblesse. L’auto semble littéralement pivoter autour d’un point milieu imaginaire. A la relance, même si la fougue des 570 canassons est en partie jugulée par l’électronique, peu invasive soit dit en passant, le train arrière me catapulte vers la courbe suivante sans frémir. Quelles que soient les conditions, la 458 reste stable et son comportement demeure sain et rassurant.
Petit coup d’œil sur le Manettino, je suis en mode « Sport », le mode par défaut de l’auto… Passons en « Race » ! Valves grandes ouvertes, l’échappement crie sa hargne à qui veut l’entendre, la sonorité envahit l’habitacle, un pur bonheur. Chaque rétrogradage est ponctué d’impressionnants coups de gaz et les borborygmes de l’échappement. La suspension se fait plus ferme et les rapports de boîte passent encore plus vite et sans ménagement. Les assistances électroniques vous laissent plus de latitude, en dérive notamment. Et pour les têtes brûlées qui ne sauraient être satisfaites d’un tel arsenal, deux autres modes permettent de totalement déconnecter les aides…
Quant au freinage, nul besoin de revenir sur le système carbone-céramique proposé en série par la marque tant le mordant et l’endurance sont au rendez-vous.
En définitive, l’association d’un châssis sans défaut et surtout polyvalent à une mécanique du tonnerre demeure la pierre philosophale de l’automobile sportive. Et il semblerait bien que Ferrari l’ait dénichée.

 

Verdict

L’arrivée de la California dans la gamme Ferrari a poussé vers le haut la traditionnelle berlinette V8. Désormais plus proche d’une supercar qu’une GT, la 458 Italia est le témoin d’une nouvelle ère dans laquelle Ferrari est entré. Et par la grande porte ! L’Italienne surclasse tout simplement l’intégralité de ce qui existe sur les routes actuellement. Les performances exceptionnelles, la polyvalence exemplaire et surtout l’émotion que procure la 458 une fois à son volant sont si exaltantes qu’il va être difficile à Porsche, Lamborghini ou même McLaren de faire un sans faute dans ces trois domaines à la fois afin de rattraper l’avance prise par Ferrari.

 

 

Prix et options – Ferrari 458 Italia


Prix de base : CHF 285’000.-

Feux avant adaptatifs : CHF 2’160.-

Etriers de freins jaune : CHF 1’530.-

Jantes 20” finition chrome foncé : CHF 2’160.-

Ecussons Scuderia sur les ailes avant : CHF 1’770.-

Bas de caisse peints : CHF 1’260.-

Capteurs de parking arrière : CHF 1’440.-

Miroir intérieur et rétroviseurs extérieurs électrochromiques : CHF 1’710.-

Zone conducteur en carbone : CHF 7’920.-
(incl. volant en carbone avec LEDs)

Fond du compte-tours blanc : CHF 990.-

Système de navigation + Bluetooth : CHF 3’780.-

Branchement iPod : CHF 1’010.-

Ciel de toit en alcantara : CHF 900.-

Montants du pare-brise en alcantara : 1’260.-

Couleur sur demande pour les coutures : CHF 515.-

Banquette arrière en cuir : CHF 2’860.-


Prix TOTAL : CHF 316’265.-

 

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Nos remerciements à Ferrari Central East Europe GmbH pour le prêt de cette Ferrari 458 Italia.

 

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