17 September 2020
2020-09-17
Le géant américain Ford n’était jusqu’en 2019 que peu visible sur le marché des véhicules dits propres, avec une propulsion alternative. Cet Explorer vient coiffer l’offre SUV du constructeur en Europe. Déjà largement répandu en Amérique du Nord, le 4ème du nom équipe notamment les forces de police outre-Atlantique. L’hybridation d’un véhicule aussi imposant fait-elle du sens ? Ce véhicule est-il adapté au Vieux Continent ? Éléments de réponse.
Texte et photos : Patrick Schneuwly
Comme première incursion parmi les véhicules plus propres, un SUV de 5 mètres de long et presque 2.4 tonnes pourrait être une surprise. A l’échelle mondiale, c’est peut-être le porte-drapeau qui fait cependant le plus de sens. Largement diffusé, il sera plus facile à vendre à travers le globe que le F150, qui est le best-seller du constructeur. Comme PHEV (véhicule électrique hybride rechargeable) suivra la citadine Ford Fiesta.
Retour à l’Explorer : il propose 7 places de série et il n’y a pas d’autres options que les couleurs. Il est doté de quatre roues motrices intelligentes, c’est un atout pour le marché Suisse, cependant sa taille pourrait être rédhibitoire ! Serait-ce la super-familiale helvétique ou un engin trop décalé dans son environnement pour séduire ? Suivez le guide.
A l’extérieur
Le Ford Explorer est connu depuis un certain temps. Si vous avez voyagé en Amérique du Nord récemment, vous en avez vu un bon nombre. Ici, il est disponible en version ST Line ou Platinum, le haut de gamme. C’est la mouture dynamique qui habille notre voiture d’essai, avec les appendices aérodynamiques qui le caractérisent. Les ailes sont gonflées, le becquet prolonge la ligne du toit, le diffuseur noir intègre les quatre sorties d’échappement plutôt sportives.
Le capot est pratiquement horizontal, ce qui renforce l’aspect impressionnant de la face avant verticale. Une calandre béante avec un logo Ford bien en valeur souligne une inscription Explorer qui fait très Range Rover. L’imposant bas de caisse en plastique noir est aussi marqué Explorer, tout comme le hayon de coffre qui porte ce nom bien en valeur. Le seuil de chargement est en outre assez haut.
De profil, le toit semble comme en suspension, avec un seul montant C couleur carrosserie, les autres se confondent aux verres teintés du véhicule. La ceinture de caisse est très haute et monte encore à l’approche du coffre. Pour les entrées de parking ou les péages, attraper le ticket demande de la contorsion. C’est sous cet angle qu’on voit le mieux les grandes jantes 20” chaussé de pneus M+S Verdestein Wintrack Pro.
Les phares à LED ne sont malheureusement pas directionnels, les deux traits surlignent les feux en tout temps, puis les phares s‘allument pour donner un regard perçant à la voiture. Côté pratique, on note la trappe de charge électrique sur l’aile avant gauche, autour de la prise des LED donnent le niveau de charge et deux boutons permettent de régler l’heure de recharge ou déverrouiller la prise.
A l’intérieur
La première impression à bord est celle de l’espace. Le conducteur et son passager sont séparés par une épaisse console centrale qui accueille un sélecteur de vitesse rotatif et le drive control ainsi que de larges rangements. A l’arrière, la place aux jambes est généreuse, mais sans décaler les sièges, l’espace aux épaules est un peu juste.
Avec le long toit panoramique vitré, on se sent à l’aise. La deuxième rangée de sièges a son propre réglage de climatisation avec des sorties d’air au plafond, tout comme des prises USB et 230 V. Les fenêtres sont en plus équipées de pare-soleil.
La dernière rangée, dans le coffre, n’accueillera que des enfants. Ces strapontins se déploient électriquement et sont heureusement facile d’accès. Voiture américaine, développée pour un marché global oblige, on dénombre un total de 12 porte-gobelet pour 7 places. Ça vous donne une idée du nombre de rangements disponibles.
Le coffre justement, est très grand. En mode 5 places, l’espace est suffisant pour 4 valises, sans compter les deux renfoncements dans le plastique et la place sous la trappe où je mets les câbles de charge. Quand tous les sièges sont rabattus, je parviens à mettre un VTT de taille XL à l’intérieur, juste en desserrant le guidon ; bluffant.
La planche de bord reste classique, avec le système Ford Sync identique à l’ensemble de la gamme au sommet de la planche de bord. Dans cet énorme écrin, il fait tout petit et presque trop loin du conducteur. Le tableau de bord numérique est très joli, les graphismes sont presque mieux que l’interface infotainment, mais j’ai parfois l’impression de manquer une information. Comme l’heure par exemple. La différence entre freinage et récupération d’énergie n’est pas non plus indiquée. Seul un pourcentage de récupération apparaît une fois immobilisé.
Le volant gainé de cuir est agréable à prendre en main, il peut sembler petit mais c’est tout ce qui est autour qui est grand. Ses palettes de changement de vitesse sont solidaires et tous les boutons dessus sont fort pratiques. Tout tombe parfaitement sous les doigts.
La qualité d’assemblage est plutôt bonne, mais pêche par des matériaux de gamme moyenne. De grandes surfaces sont en plastiques durs, quelques-uns sont moussés et enfin des inserts en plastique gris font plus salissant qu’élégant. Dans une voiture tout équipée à presque CHF 90’000.-, je trouve ce choix risqué.
Les sièges à réglage électrique sont confortables, bénéficient d’une large assise mais leur cuir privilégie la solidité à l’esthétique. Le grain est gros, les coutures épaisses, on se sent plus dans un taxi qui doit marcher sur la durée que dans un SUV haut de gamme.
Sous le capot
Pour ce SUV “plug-in hybrid” il fallait trouver un moteur fort et volontaire, notamment à cause du poids de l’ensemble. De plus, ce véhicule a été pensé pour être commercialisé partout dans le monde. C’est probablement pourquoi on trouve bien un moteur essence et non diesel dans le Explorer.
Ford a jeté son dévolu sur le V6 3.0l EcoBoost, nom de développement Nano. Je précise car il est plutôt éloigné du V6 3.5l EcoBoost de la Ford GT qui porte le surnom Cyclone. Avec 357 ch, il n’a rien à envier à son semblable de la supercar. Il est bien suffisant pour déplacer l’Explorer et son système d’hybridation.
Composée d’une batterie de 13.6 KW/h et d’un moteur 48 V délivrant 100 ch, cette partie hybride rechargeable déplacera le SUV sur 40 km sans brûler de carburant fossile. Les batteries se rechargent au freinage, ou le soir sur secteur. Au mieux, l’Explorer PHEV accepte du courant monophasé de 16 ampères, se rechargeant en 3.2 h. Sur une prise domestique 10A, compter 11.6 h pour une recharge complète !
Le constructeur a sélectionné une boîte de vitesse automatique 10 rapports pour son SUV, celle-ci colle bien à l’image du véhicule en offrant un confort de conduite à la hauteur. Les vitesses passent sans à-coups, rétrogradent de façon logique quand c’est nécessaire.
La transmission intégrale enfin promet ce qu’il faut de grip à tout moment sur chaque roue. Grâce au Drive Control qui doit notamment ajuster le comportement de l’électronique au terrain. Avec des modes comme Piste, Faible adhérence ou Neige profonde/sable, on peut s’attendre à tranquillement pouvoir quitter la route.
Véhicule proposé uniquement “full option”, le Ford Explorer est doté de toutes les aides à la conduite. Régulateur de vitesse actif avec maintien de la voie jusqu’à l’arrêt et circulation en file, caméra 360°, stationnement automatisé, surveillance des angles morts, etc. Il est même doté de l’aide au remorquage alors que notre modèle d’essai est dépourvu d’attelage.
Au volant
Installé à bord, il faut du temps pour appréhender les dimensions du véhicule. Le capot est long, les ailes larges et l’arrière de la voiture prend une place importante. Aidé des caméras, on joue avec la direction très souple pour emmener l’Explorer sur ses premiers tours de roue.
Tout électrique, ce SUV est très agréable à conduire. Même s’il faut le compas dans l’oeil, en ville les gens nous regardent avec un léger sourire. Ne pas faire de bruit aide à faire accepter le gros gabarit. Le moteur électrique n’est de loin pas un moteur d’appoint, il peut vous propulser sur l’autoroute à plus de 100 km/h en silence. Ce n’est qu’en marquant trop vigoureusement une accélération qu’on réveillera le V6.
Et quel réveil ! Il est arrivé que la synchronisation des vitesses de rotation ait causé un à-coup, mais si je parle de réveil c’est aussi pour le bruit. Une douce mélodie agréable à écouter et qui fera sur demande quelques vocalises très mélodieuses.
Je roule surtout en le mode Normal et mode Eco, ceux qui font du sens au quotidien. J’essaye brièvement le mode Sport, il est pratiquement inutilisable. La pédale d’accélérateur est beaucoup trop sensible et, dans la circulation, la voiture saute sans cesse en avant.
Sur mon chemin, je saisis l’occasion d’emprunter une piste de cailloux au milieu des champs. Mode Piste activé, le V6 se met immédiatement au ralenti. Il s’aidera du moteur électrique si nécessaire. La petite côte est avalée comme une formalité, en secouant un peu les occupants car la suspension reste ferme. En descente, j’enclenche l’aide qui maintient ma vitesse et me laisse tranquillement atteindre mon but.
Seulement, avec un tel patronyme, l’Explorer doit être capable de bien plus ! J’aperçois un chemin qui quitte la piste pour partir entre les oliviers. Les traces au sol me confirment qu’un tracteur a déjà pris ce chemin. Je m’y engage doucement et alors que mes roues avant sont dans la terre et les roues arrière dans la caillasse, je perds l’adhérence. J’essaye le mode Sable mais aussi faible adhérence : je reste immobile. En léger croisement de pont, sans blocage de différentiel je n’irai pas plus loin.
Le Ford Explorer est une voiture appréciable pour voyager. Bien installé, les kilomètres défilent sans trop de fatigue. Ce qui défile aussi, ce sont les litres de sans plomb. Car une fois l’autonomie de la batterie consommée, il ne reste que le moteur thermique pour se déplacer. Avec le poids et la prise au vent de l’engin, il consomme allègrement 10 l/100km avec une vitesse de croisière normale.
En montagne, surtout en descente de col, on a tendance à vouloir prendre le contrôle de la boite de vitesse pour utiliser de façon optimale le frein moteur. Mais si on souhaite pleinement profiter de la récupération d’énergie, il faut laisser faire le mode automatique. L’impression de frein moteur est alors présente et permettra de gagner quelques kilomètres d’autonomie électrique.
A l’inverse, lorsqu’on monte, la mécanique est rudement mise à contribution lorsque les batteries sont vides. Il faut alors mettre 2.4 tonnes en mouvement ce qui a un impact direct sur la consommation. La suspension est, elle, à la hauteur du mastodonte. Il ne prend pas de roulis, même en haussant le rythme. L’Explorer garde le cap de façon impressionnante. Cette rigueur a son revers, le confort à bord s’en ressent lorsque la chaussée est dégradée.
Verdict
D’un point de vue général, le Ford Explorer peine à trouver sa place sur une route européenne. Je résumerai cet essai en disant qu’il n’est pas sur le bon continent ici. Pensé à une échelle mondiale, ce n’est pas en Suisse qu’il a les meilleures cartes en main.
Cependant, je dois dire qu’il est à la hauteur en terme de place à bord et d’agrément de conduite. A condition d’avoir une borne de charge à la maison, il fera 40 km chaque jour sans entamer son réservoir de carburant. Ce qui, sur la durée, peut s’avérer un calcul intéressant, on ne part pas chaque semaine en vacances. Celui qui conjugue le besoin constant de place, le besoin occasionnel d’un SUV pour tirer quelque chose, et un usage quotidien d’environ 50 km, le Ford Explorer est en tête de liste.
Prix et options – Ford Explorer PHEV ST-Line
Prix de base : CHF 88’100.-
Peinture métallisée “Bleu Atlas” : CHF 900.-
Prix TOTAL : CHF 89’000.-
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Nos remerciements à Ford Motor Company (Switzerland) S.A. pour le prêt de ce Ford Explorer PHEV ST-Line, ainsi qu’au garage ByMyCar à Meyrin pour leur soutien logistique.
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