Essai – Jaguar I-Pace HSE : La concurrence arrive !

Depuis quelques années, la seule option disponible pour une voiture électrique performante et spacieuse se trouvait chez Tesla et c’était quelque chose de curieux dans un secteur automobile très concurrentiel. Le changement climatique et des lois toujours plus contraignantes obligent les constructeurs à revoir le moteur thermique. Le I-Pace est la solution de chez Jaguar pour affronter cette transition et éliminer le moteur à explosion vieux de plus de 100 ans.

  • Deux moteurs électriques asynchrones
  • 400 ch (294 kW)
  • 696 Nm
  • Transmission à rapport unique
  • Vitesse maxi : 200 km/h
  • 0 à 100 km/h en 4.8 sec.
  • Poids : 2’208 kg
  • Long./larg./haut. (mm): 4’682 x 2’011 x 1’565
  • Conso. mixte : 17.5 kWh/100km
  • Emissions CO2 : 0 g/km (A)
  • Dès CHF 82’800.-, mod. essayé : CHF 110’240.-


Texte et photos : Tony da Silva


Annoncée comme la solution à la mobilité motorisée de demain, la voiture 100% électrique débarque chez des constructeurs plus classiques. En effet, depuis 1935 et le lancement de sa première SS Jaguar 2.5l Saloon, la marque a exclusivement commercialisé des véhicules munis de moteurs à explosion.

Après 83 ans d’existence, Jaguar n’a pas imité l’ensemble de l’industrie en annonçant un futur produit à grand renfort d’actions marketing. A la surprise générale, ils ont tout simplement présenté un concept car en 2016 et l’I-Pace définitif a été présenté en mars (les livraisons commencent maintenant). Je salue ce tour de force et vous invite à me suivre pour cet essai 100% électrique.

A l’extérieur

Après l’E-Pace et le F-Pace, c’est donc le troisième SUV Jaguar à voir le jour. Au niveau de la ligne, il se situe à mi-chemin entre un SUV classique et une limousine coupée. J’apprécie ce design même si je trouve que la marque a été très conservative avec la face avant.

En effet, pas question de revoir la grande grille avant avec le logo Jaguar au centre alors qu’en réalité, ce bouclier n’est pas ajouré comme dans toutes les voitures qui ont un moteur thermique. Il s’agit donc d’un parti pris stylistique que je trouve un peu traditionaliste.

Ceci dit, l’ensemble est plutôt attrayant et même les badauds jettent un œil curieux lorsque la voiture est à l’arrêt. Le véhicule a un style dynamique et semble prêt à bondir sur la route. Les jantes de 20 pouces (standard sur le modèle HSE) confèrent au véhicule un air racé et sportif alors que l’empattement est particulièrement long : 2.99 mètres (c’est plus long qu’une BMW Série 5 ou Mercedes Classe S). De profil, il reste donc environ 80 centimètres de chaque côté entre l’axe des roues et les extrémités du véhicule, ce qui est assez faible. D’après moi, c’est un des éléments qui rend l’ensemble discret et pas aussi massif que d’autres SUV.

Bref, la ligne est réussie même si j’aurais aimé voir la marque prendre un peu plus de risque.

A l’intérieur

Une fois à l’intérieur, je suis ravi par l’ensemble et le mélange des matériaux. Le cuir, dans cette couleur claire, est agréable au toucher et les coutures sont magnifiques. J’affectionne particulièrement la grande planche de bord qui file jusqu’à la base du pare-brise et qui propose des arabesques de coutures pour fondre les différents composants entre eux.

Quand le moteur est « éteint », plusieurs zones opaques recèlent en réalité un écran et c’est très tendance. Au milieu du tableau de bord, deux écrans tactiles appelés Touch Pro Duo : un de 10 pouces et, juste en dessous, un autre de 5.5 pouces. Derrière le volant, la marque a aussi placé un écran de 12.3 pouces. Bien entendu, dès que je presse la touche « Start/Stop », toutes ces surfaces s’illuminent et là, il faut quand même faire le tri, surtout que l’écran derrière le volant permet aussi d’afficher différentes vues.

L’espace est confortable mais je trouve que les sièges Sport sont un peu durs alors que l’assise est très large et n’offre pas un maintien latéral extraordinaire. La vue à 180 degrés est bonne alors que la lunette arrière est très haute est offre une vue minimale. Heureusement, la caméra de recul est incluse.

A l’arrière, le confort est aussi bon mais je ne comprends pas vraiment pourquoi il y a une excroissance au sol, comme si le véhicule était équipé d’un tunnel de transmission. Contrairement au fameux constructeur électrique, ici Jaguar reproduit un élément qui traverse toute la voiture de façon longitudinale et prive d’espace les occupants.

Enfin, le coffre est facile d’accès et offre un espace de 638 litres extensible à 1’435 litres avec les sièges arrière abaissés.

Sous le capot

La grosse nouveauté est là et, en réalité, il y a deux moteurs de 200 ch chacun. L’un se situe à l’avant et doit occuper pas mal de place, car Jaguar offre uniquement 27 litres de rangement sous le capot (à peine suffisant pour les deux câbles de recharge). L’autre est sur l’axe arrière et le tout offre 400 ch ainsi qu’un couple 696 Nm dès 0 t/min.

Pour les batteries, la marque fournit un « réservoir » de 90 kWh et le tout est caché dans le sol, sous le plancher, entre les deux ponts avant et arrière. Elles sont garanties 7 ans ou 160’000 km pour ne pas descendre en dessous de 70% de la charge totale. La répartition des masses est ainsi idéale et permet d’abaisser le point de gravité du SUV.

Grâce aux deux moteurs, la transmission est permanente aux quatre roues et les suspensions pneumatiques (option à CHF 1’700.-) offrent un confort adapté aux différents modes de conduite (la voiture s’abaisse automatiquement de 10 mm dès 105 km/h).

Au volant

La conduite d’une auto électrique offre toujours son petit frisson car, après avoir « allumé » la voiture, cette dernière n’émet aucun bruit. Mouvoir le véhicule alors qu’aucun son n’est audible est toujours un phénomène curieux après des dizaines d’années à conduire ou tester des véhicules à explosion.

Ce silence est trompeur et, dans bien des cas, il faut être prudent car l’absence de bruit induit une réalité déformée vis-à-vis de la vitesse. L’affichage tête haute (option nécessaire à CHF 640.-) est, d’une façon générale, excellent mais à part lire les informations projetées, c’est difficile de connaître sa vitesse instantanée car le silence à bord ne permet pas de se forger une opinion. La preuve avec quelques personnes qui ont pris le volant de cette Jaguar : ils sont enthousiastes et franchissent allègrement les limitations de vitesse sans s’en rendre compte.

Ceci dit, les performances sont saisissantes et continues. Pas de turbo ou de délai quelconque, la puissance et le couple sont disponibles immédiatement et c’est toujours un peu surréaliste d’accélérer pareillement sans bruit, à l’exception d’un très léger sifflement. A contrario, il faut vraiment s’habituer à ce « frein » moteur car, par défaut, il est réglé sur le mode de production d’électricité le plus élevé. Conséquence ? Ça freine fort dès qu’on relâche brusquement l’accélérateur et ce n’est pas toujours agréable. Il faut donc là aussi revoir un peu son style de conduite et apprendre à lâcher doucement la pédale des gaz.

Sur le plan du châssis, J’aime les sensations et ne ressens pas un poids excessif à la conduite alors que le constructeur annonce 2’208 kg à vide. Les accélérations sont enivrantes, le freinage franc (au-delà du « frein moteur ») et le roulis à peine perceptible dans les virages rapides. La direction est nette, même si je trouve que le rayon de braquage n’est pas excellent (12.4 mètres).

Du côté de la consommation, la marque n’améliore pas l’optimisme de son équipe marketing avec une autonomie annoncée sur le papier de 470 km en cycle WLTP alors que l’ordinateur n’annonce jamais mieux que 300 km. Comme toujours avec un véhicule 100% électrique, et à l’inverse des moteurs thermiques, c’est surtout en ville que la consommation est la plus basse grâce à la production d’électricité sur les phases de décélération. A l’inverse, c’est les trajets autoroutiers qui seront les plus énergivores avec une consommation de 30 kWh environ contre 24 kWh en ville.

Verdict

Les qualités dynamiques de la voiture sont indéniables et il est loin le temps où les constructeurs qui se lançaient dans l’électrique proposaient des voitures amorphes et franchement difformes. Le Jaguar I-Pace reprend dans son ADN les caractéristiques de la marque et offre une automobile attractive, performante et innovante.

Bien entendu, le côté un peu 1.0 de l’interface est ennuyeux et il y a des éléments agaçants pour ne pas dire incompréhensibles. Il manque par exemple des lumières de lecture au plafond pour les passagers avant et que dire de cette caméra de recul qui a un décalage de quelques dixièmes de seconde entre ce qu’elle affiche et la réalité ? Je ne parle même pas de l’assistance au parcage latéral, je n’ai jamais réussi à la faire fonctionner (ou du moins elle n’a jamais détecté de place). J’espère que des mises à jour fréquentes permettront de gommer ces problèmes de jeunesse.

Et quid de la recharge ? Il est aisé de procéder au chargement des batteries et de plus en plus de réseaux de distribution puissants sont disponibles même si on est encore loin des 3’300 stations à essence en Suisse. A l’heure actuelle, il y a plus de trois millions de bâtiments avec de l’électricité sur le territoire et si vous disposez d’un garage, il y a de fortes chances que vous ayez une prise électrique 220V. Évidemment, il faudrait au moins une prise de 400V triphasée pour rendre le temps de chargement plus court mais pendant la dizaine de jours d’essai, je n’ai pas ressenti ce manque (je ne fais pas des centaines de km tous les jours). De plus, les 10 secondes passées à connecter la voiture chaque soir compensent largement les 10 ou 15 minutes qu’il faut dépenser pour refaire un plein d’essence, même si ce dernier prend seulement quelques minutes.

Enfin, je me permets une petite digression. Quid d’un parc automobile 100% électrique en Suisse ? Sur l’année, il faudrait produire environ 19% à 24% d’électricité en plus en fonction des scénarios et l’état devrait « renoncer » à presque CHF 5 milliards de taxes… soit environ 6% des revenus de la Confédération. Alors que la Suisse a décidé de stopper sa filière électronucléaire entre 2019 et 2034, comment la Confédération gardera un budget équilibré et comment les producteurs d’électricité pourront répondre positivement à la demande ? D’un point de vue environnemental et stratégique, cette question est fondamentale.

Prix et options – Jaguar I-Pace HSE

Prix de base : CHF 97’200.-

Peinture Metallic/Mica : CHF 1’060.-

Pack cuir étendu Premium : CHF 2’400.-

Demo Specification Pack : CHF 1’820.-

Suspension pneumatique gérée par l’électronique : CHF 1’700.-

Toit panoramique fixe : CHF 1’380.-

Système Adaptive Dynamics : CHF 1’180.-

Climatisation automatique 4 zones : CHF 960.-

Pack hiver : CHF 560.-

Clé loisirs : CHF 440.-

Rails dans le coffre avec système de fixation des bagages : CHF 380.-

Plaques de seuil en métal éclairées avec motif Jaguar : CHF 320.-

Phares antibrouillard avant : CHF 220.-

Adaptive Surface Response (AdSR) : CHF 220.-

Système d’ionisation de l’air dans l’habitacle : CHF 140.-

Boîte à gants verrouillable et réfrigérée : CHF 140.-

Tapis de sol : CHF 120.-

Prix TOTAL : CHF 110’240.-

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Nos remerciements à Jaguar Land Rover (Suisse) SA pour le prêt de ce Jaguar I-Pace HSE, ainsi qu’au garage Emil Frey SA à Crissier pour leur soutien logistique.

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