Essai – Rolls-Royce Ghost EWB : Ou comment voyager avec son salon

Rolls-Royce, une marque qui est encore synonyme de luxe et de qualité automobile nous a proposé de prendre le volant du « petit » modèle de la gamme pour quelques centaines de kilomètres entre Milan et Genève. Après quelques jours à son bord, Wheels And You vous livre aujourd’hui ses impressions sur cette reine du segment.


  • V12, 6’592 cm3
  • 563 CV à 5’250 t/min
  • 780 Nm dès 1’500 t/min
  • Boîte de vitesses automatique, 8 rap.
  • Vitesse maxi : 250 km/h
  • 0 à 100 km/h en 4.8 sec.
  • Poids : 2’420 kg
  • Long./larg./haut. (mm): 5’569 x 1’948 x 1’550
  • Conso. mesurée : 16.3 l./100 km
  • Emissions de CO2 : 329 g/km (G)
  • dès CHF 421’600.-
    modèle essayé : CHF 470’475.-


Texte et photos : Tony da Silva


 

A l’extérieur

Pour le commun des mortels, croiser une Rolls reste un évènement rare mais depuis l’arrivée de la Ghost dans le portfolio du constructeur, c’est un peu moins singulier. Ceci dit, quand je prends possession de cette Ghost EWB (pour « Extended Wheel Base » ou châssis long) à Milan, je suis tout de même impressionné par la présence de la voiture.

Le galbe et les rondeurs du véhicule ne peuvent cacher des dimensions hors normes dans une industrie automobile dominée par des voitures au gabarit contenu. Jugez plutôt : 5.57 mètres de long pour une largeur de 1.95 mètre sur une hauteur de 1.55 mètre. C’est 17 centimètres plus long que la Ghost standard qui – à mon avis – ne manquait pourtant pas de place à l’arrière. De plus, la robe deux coloris accentue encore la longueur avec ce capot, toit et coffre en Cassiopeia Silver. Le contraste avec le Midnight Sapphire est saisissant.

La première impression est donc imposante malgré une ligne beaucoup plus fluide que la Phantom, le véhicule amiral de la marque. Juchée sur ses roues de 20 pouces, la présence est indéniable et la voiture semble tellement grande que je me demande si les routes italiennes vont facilement s’accommoder d’un tel vaisseau. Je m’en voudrais d’abimer les jantes ou ces imposantes portières qui semblent interminables.

Ceci dit, les designers de la marque ont réalisé une belle œuvre car globalement, même si le volume est imposant, l’ensemble est réussi et les premières pensées qui viennent à l’esprit sont liées à des termes comme noblesse, rigueur, présence, élégance, luxe et j’en passe. Bien entendu, ces mots sont à la limite de sentiments beaucoup plus péjoratifs comme exubérance, ostentation ou encore excès mais malgré tout, sur le moment ou pendant les quelques jours passés avec le véhicule, je n’ai jamais rien ressenti de tel.

 

A l’intérieur

Ce volume extérieur impressionnant se retrouve bien entendu à l’intérieur. On a accès à un spacieux habitacle à l’avant, mais surtout à l’arrière grâce à ces portes à ouverture inversée. Pas de problème donc pour monter à bord du véhicule et dès que le postérieur se pose sur le siège, on se surprend même à se replacer tant l’espace à disposition est important.

Au-delà de la qualité du cuir – tout simplement irréprochable tant visuellement qu’au toucher – les sièges sont d’un confort incomparable à l’exception d’un canapé de salon. Le dossier des sièges avant affiche une épaisseur supérieure à 30 centimètres ! D’ailleurs, parler de confort n’est pas le mot juste et je pense que le bien-être ressenti à bord frise la prodigalité. Soyons fous : la marque devrait peut être décliner des canapés de salon, elle n’y serait pas ridicule !

Bien entendu, tout le reste est à l’unisson ou presque. Les bois, les cuirs, le volant, etc. sont autant d’éléments qui traduisent tout le soin que les ingénieurs et designers ont apporté au véhicule. Ajoutez à ça une instrumentation multimédia de premier plan (merci BMW) qui prend sans problème en compte mon iPhone et le tableau est pratiquement idyllique… à l’exception de quelques détails dont je parlerai dans les conclusions.

D’une façon générale, la disposition des boutons et des différents leviers est claire et parfaite. De plus, et c’est remarquable malgré l’armada d’options et d’assistances à bord de ce type de véhicule, tout est parfaitement intégré et rien ne semble superflu. Pour moi, ce genre de constat est un tour de force car combien de fois je me suis retrouvé dans un véhicule beaucoup plus modeste mais avec une profusion de boutons et leviers absurdes ? A bord d’une Ghost, tout est intuitif et simple à utiliser au point qu’on en vient à oublier tous les éléments qui sont configurables de la sonorisation aux assistances de conduite.

 

Sous le capot

Là encore, les choses ne sont pas faites à moitié. Grâce au V12 greffé de deux turbos, la fiche technique promet des performances hors normes sur ce type de véhicule. Jugez plutôt : les 6.6 litres délivrent 563 CV (420kW) à 5’250 t/min mais surtout, les occupants peuvent compter sur un couple de 780 Nm et ce, dès… 1’500 t/min, ou quasi le ralenti…

Un peu par habitude, je m’attendais à trouver un moteur encastré à coups de marteau et autre chausse-pied mais il n’en est rien… à l’ouverture du capot, il reste encore de la place !

Plus sérieusement, le bloc moteur provient directement de BMW et du 6 litres V12 utilisé dans la série 7. Bien entendu, il a été passablement remodelé pour Rolls-Royce mais fondamentalement, c’est le gage d’une qualité et performance optimum. Rétrospectivement, vu les exigences du marché et des différentes législations en vigueur et à venir, une telle entreprise aurait été vouée à l’échec si la marque ne s’était pas liée à un grand constructeur.

Grâce à une instrumentation claire et facile, n’importe qui comprendra que le compte-tours a cédé sa place à une « réserve de marche » indiquant la puissance utilisée du moteur,  de 0% à 100%. Cet élément reste tout aussi enivrant quand on appuie (ou enfonce) la pédale d’accélérateur.

 

Au volant

Pour le commun des mortels, un voyage à bord d’une Ghost sera plein de surprises mais pas forcément là où on s’y attend. Tout d’abord, entre être un passager confortablement installé à l’arrière et un chauffeur fièrement attitré à la conduite de la voiture, les sensations ne sont pas les mêmes.

Bien sûr, le confort lié à l’assise et au silence du véhicule seront identiques mais ce qui sera le plus notable, c’est le manque de sensations ressenties au volant. Je vois que vous froncez les sourcils à la lecture de cette phrase et je vous dois une explication.

Dès qu’on s’installe à bord de ce palace roulant et qu’on démarre, tout n’est que volupté et silence. Mieux, quand le passager se met à l’arrière, il a tout le loisir de regarder un film sur le système audio-visuel logé dans les sièges avants sans être incommodé par un quelconque bruit ou déformation de la route. Par contre, pour le conducteur, force est de constater que tout ce qui provient de la route ou presque est filtré à l’extrême et le problème ne vient pas de ce grand volant très fin. C’est tout simplement une signature de Rolls Royce et vous ne verrez jamais un chauffeur croiser les bras pour faire une manœuvre car il fait glisser le volant d’une main à l’autre.

Tout ou presque est filtré à l’extrême et cela contribue pleinement à une locomotion unique dans le monde de l’automobile. Néanmoins, ce manque de sensation trouve ses limites dans des cas particuliers comme par exemple le manque d’adhérence sur la route qui nous a mené au tunnel du Grand-St-Bernard. Avec une température de -2 degrés et un revêtement luisant sous un clair de lune en plein milieu de la nuit, j’ai fait preuve d’une extrême vigilance à l’approche des virages et j’ai voulu en avoir le cœur net ; en sortie de courbe, j’ai réaccéléré d’une façon un peu plus brutale et là, c’était Noël ! Toutes les lumières du tableau de bord ont commencé à clignoter de manière frénétique. Clairement, la route était à moitié gelée mais avant cet exercice, je n’ai rien senti derrière le volant et pour cause, ce filtrage extrême gomme tout.

Avec plus de 560 chevaux et l’excellent affichage tête haute, quelques têtes fortunées pourraient bien se sentir invisibles à bord de ce véhicule « so British » et risqueraient d’aborder les routes d’une façon inconsidérée. Ajoutez à ça le Dynamic Package et notre paquebot donnerait presque l’impression de pouvoir passer n’importe quelle courbe à une vitesse dangereuse voire suicidaire. Je ne puis que recommander la plus haute prudence aux futurs acquéreurs de ce fleuron de l’industrie automobile car les lois de la physique finiront par donner tord à n’importe quel optimiste et ce, même si les freins se montrent toujours à la hauteur des sollicitations du chauffeur.

 

Verdict

D’une façon générale, tous les superlatifs sont utilisés pour décrire des sensations fortes mais dans cet essai, il faut réaliser l’exercice inverse. Comment s’extasier devant autant de silence ? Comment transmettre ce plaisir délirant de confort ? Comment exprimer le plaisir d’être à bord d’un véhicule aussi raffiné dans tous les détails ?

Bien sûr, à CHF 420’000 et des poussières, on peut rester pantois devant l’utilisation de plastique peint en chrome au niveau des poignées intérieures de porte, des buses d’aération et certains boutons. Même la qualité des écrans dits « cinéma » à l’arrière semble venir directement des années 90 en comparaison à n’importe quelle tablette récente.

Mais la finalité n’est pas là. Ce véhicule rappelle à chaque seconde qu’il y a encore un autre monde automobile à disposition de ceux qui en ont les moyens. Bien entendu, au volant de cette voiture, on attire le regard des badauds mais je n’ai jamais ressenti de la haine ou du mépris. Tout au plus, les gens m’ont regardé avec envie et ça, malgré la déferlante anti-voiture de bon aloi, ça fait quand même plaisir.

Je le clame haut et fort, notre société à encore de la place pour ce genre d’automobile d’exception.

 

 

Prix et principales options – Rolls Royce Ghost EWB

Prix de base : CHF 421’600.-

Finition “Metal Liquide” satinée du capot et tour de pare-brise : CHF 6’845.-

Echappements visibles : CHF 3’960.-

Phares adaptatifs : CHF 1’350.-

Jantes forgées à bord poli 20” : CHF 8’425.-

Logo “RR” brodé dans les appui-tête, ton sur ton ou contrasté : CHF 1’520.-

Tables de pique-nique : CHF 3’540.-

Configuration “Théâtre” arrière : CHF 8’565.-
(Chargeur multimédia, casques audio et câble iPod)

Tuner TV : CHF 1’470.-

Assistance de conduite “3” : CHF 6’405.-
(Affichage tête haute, avertisseur de changement de voie, feux de route automatiques, vision de nuit infrarouge, régulateur de vitesse adaptatif)

Tapis de sol en peau de mouton : CHF 1’350.-

Seuils de porte polis : CHF 2’410.-

Vitres arrière teintées : CHF 3’035.-

Prix TOTAL : CHF 470’475.-
(Tarifs soumis à la fluctuation de l’Euro)


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Nos remerciements à Rolls-Royce Motor Cars Ltd. pour le prêt de cette Rolls-Royce Ghost EWB.

 

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