10 November 2011

Le terme « envoyer des watts » est passé dans le langage courant à propos des voitures sportives. Avec la Tesla Roadster, l’image rejoint la réalité. Mettons-nous donc au courant.

  • Moteur électrique triphasé, 375 volt AC
  • 288 CV à 4’400 – 6’000 t/min
  • 400 Nm à 0 – 5’100 t/min
  • Transmission à rapport unique
  • Vitesse maxi : 201 km/h
  • 0 à 100 km/h en 3.7 sec.
  • Poids : 1’238 kg
  • Autonomie : 340 km
  • Emissions de CO2 : 0 g/km (A)
  • dès CHF 142’200.-
    modèle essayé : CHF 181’190.-

 


Texte et photos : Jérôme Marchon


 

Quel est le lien entre le système de paiement « Paypal » et la marque Tesla ? L’un de ses fondateurs. Elon Musk, c’est son nom, après avoir révolutionné le mode de paiement sur internet, a décidé de donner un grand coup de pied dans la fourmilière de l’automobile qui cherche désespérément à s’affranchir du dieu pétrole. Avec deux principaux associés, il fonde en 2003 dans la Silicon Valley la société Tesla Motors, dont le nom reprend celui du grand savant serbe Nicola Tesla, inventeur entre autres du moteur électrique à courant alternatif triphasé.
En 2008 sort la version définitive du premier véhicule de série entièrement électrique, la Tesla Roadster. Provocation ou idée lumineuse par les temps qui courent, ce nouveau joujou prend la forme d’un bolide sportif, empruntant son châssis à la Lotus Elise. Fini donc les tentatives laborieuses de voitures électriques basées sur des citadines françaises sans charme ou les créations délirantes de designers semblant avoir puisé leur inspiration sur la chaîne Cartoon Network.

Nous avons pris le volant de la Tesla Roadster 2.5, ultime évolution du modèle, dans sa version “Sport” et voici nos impressions.

 

A l’extérieur

Immanquablement, le lien de parenté avec la Lotus Elise saute aux yeux. Certes, l’avant et l’arrière sont spécifiques à la Tesla, mais la cellule centrale, avec son pare-brise aplati et fortement bombé, ne trompe pas. Ceci dit, les deux bolides ne partagent que 7% de leurs composants, dont les rétroviseurs, le pare-brise, la planche de bord ainsi que quelques autres commandes. Les éléments de carrosserie sont réalisés entièrement en carbone afin de contenir le poids de notre destrier, déjà conséquent en raison des batteries.
La face avant se veut plus douce et policée que la cousine anglaise dans ses lignes ; il manque à mon goût un peu d’agressivité. Les blocs optiques globuleux et l’énorme bouche centrale manquent de finesse, même si les ouïes latérales dans le bouclier, le petit capot en carbone et la lame avant dans le même matériau ajoutent une touche sportive bienvenue. A l’arrière, les feux, certes originaux, auraient mérité un meilleur habillage que ces fonds noirs.
Plus longue de 16 cm et plus large de 15 cm qu’une Lotus Elise, la Tesla Roadster conserve cependant des proportions parfaites et un style sobre, si ce n’est la couleur de notre modèle d’essai, lui conférant une belle présence sur la route. Enfin, son faible encombrement lui permet d’évoluer très facilement dans nos enfers urbains.

 

A l’intérieur

Bienvenue à Hethel… ou presque. En termes d’agencement, c’est un copier-coller de Lotus. Ce qui veut dire que l’habitabilité est plutôt restreinte et l’accès aux places un exercice peu recommandé aux personnes souffrant de rhumatismes. Par contre, Tesla a consenti un effort non négligeable en ce concerne l’habillage : du cuir, du carbone, un peu de plastique et beaucoup de moquette. Le niveau de finition reste relativement bon compte tenu du travail artisanal réalisé. Cependant quelques défauts de vieillesse prématurée sur une voiture récente de ce prix (à partir de CHF 142’200.- tout de même) comme la console branlante, les sièges devenus avec le temps « à bascule » et la basse qualité de certains plastiques auraient le don de fâcher quelques sensibilités. De mon côté habitué à l’habitacle spartiate d’une Elise, j’ai trouvé les quelques aménagements réalisés judicieux et bien réussis.
Derrière le petit volant à la jante un poil trop fine, se cache le combiné tachymètre/compte-tours et indicateur de charge. L’essentiel s’y trouve, notamment un premier indicateur d’autonomie. L’écran du module GPS/radio Alpine au centre du tableau de bord est certes impressionnant mais l’utilisation de l’appareil est handicapée par des touches microscopiques et mal placées obligeant, en roulant, de quitter durant de longues secondes la route pour procéder au simple réglage du volume. A noter toutefois l’excellente qualité du matériel Hifi monté de série. C’est bien la moindre des choses avec une mélodie mécanique inexistante…
Au-dessous des commandes de climatisation se trouve l’ordinateur de bord spécifique à la Tesla. Il gère l’utilisation et affiche le niveau de charge restant dans la batterie ainsi qu’une seconde indication théorique de l’autonomie. La différence principale entre les deux affichages (celui de tableau de bord et celui de la console) réside dans le fait que le premier réalise une moyenne d’autonomie en fonction du style de conduite adopté durant les dernières minutes, alors que sur la console l’ordinateur ne tient compte que du niveau de charge. Pour avoir une idée relativement précise de la distance que vous pouvez parcourir, un peu de calcul mental est nécessaire afin de faire une… moyenne des moyennes.
Enfin, sur le « tunnel » central prennent place également les commutateurs du sens de marche, soit « D » pour avancer, « R » pour reculer, « P » pour parquer et « N » pour le point mort.
Utilisant une base somme toute spartiate, les décorateurs Tesla ont réussi malgré tout à créer une atmosphère plutôt luxueuse mais malheureusement assombrie par une finition qui reste moyenne.

 

Sous le capot

Le moteur électrique triphasé développant 288 CV et surtout 400 Nm de 0 à 5’000 t/min est le cœur de cette Tesla Roadster. Léger (moins de 50 kg), il est accouplé à une transmission à rapport unique fabriquée par Borg Warner. Le 0 à 100 km/h est abattu en moins de 4 secondes. Les batteries, elles aussi exclusives à Tesla, sont sous-traitées auprès de Panasonic et Sanyo au Japon. Chacune des 6381 cellules Lithium-Ion est gérée, nous l’avons vu, par l’ordinateur de bord afin d’en tirer le rendement maximal en tout temps. En outre le petit ordinateur permet de choisir parmi trois modes de consommation principaux : une configuration « range », qui limite la puissance délivrée par le moteur et par là même la consommation d’électricité, un mode « standard »  et un mode « performance » permettant d’utiliser toutes les ressources de l’engin dès le démarrage.
Selon la marque et les essais réalisés, au bout de sept ans leur capacité devrait encore avoisiner les 80% de la puissance. Enfin, leur emplacement central arrière permet de juguler un peu l’effet de leur poids conséquent sur le comportement de l’auto.
Il est difficile de parler consommation pour une telle motorisation. Nous avons débuté notre essai avec une autonomie affichée de 350 km, batteries pleines, ce qui paraît honnête. Notre parcours mêlant ville, autoroute, routes secondaires et petite arsouille dans le relief de lémanique sur environ 120 km, il restait environ 80 km d’autonomie au moment de la reddition du véhicule. Ça fait tout de même un peu juste pour un véhicule incitant à la conduite sportive.
Vous souhaitez descendre dans le sud ? Pas de problème, mais prévoyez trois jours pour y aller et surtout les hôtels qui disposent du matériel nécessaire à la recharge. Car c’est là que le bât blesse : branchée sur le secteur à 220 V, il vous faudra plus de douze heures pour « faire le plein ». Si vous disposez d’une prise 32 ampères le temps nécessaire sera de 7 heures ou moins de 4 heures avec un accès 70 ampères. Oui, je vous l’accorde, ces chiffres sont ceux d’une recharge complète depuis le niveau minimum des batteries. Mais le temps de charge demeure une contrainte de taille, surtout dans l’optique d’une utilisation “plaisir” qu’impose la Tesla. Cependant, selon les représentants du constructeur, il s’avère que la plupart des clients optent pour une recharge à chaque opportunité, à l’image un peu de ce que bon nombre de personnes font avec leur téléphone portable.

 

Au volant

Une fois le haut et large seuil de porte enjambé, je prends la place du pilote. Les sièges, peu avenants de prime abord avec leur rembourrage chiche et leur look sportif, proposent une position de conduite parfaite, un maintien excellent en conduite sportive tout en garantissant un confort de premier ordre totalement exempt de fatigue. Clé dans le neiman, pression sur le coupe-circuit, quart de tour vers l’avant. Trois bips me confirment que l’auto est démarrée. C’est tout. Sélectionneur de marche sur « D » et l’auto s’ébroue dans un silence de cathédrale. Seul un petit « wiiizzzzzz » et le bruit de roulement des pneumatiques viennent perturber cette quiétude intimidante. D’emblée la direction non-assistée frappe par sa lourdeur à basse vitesse. Eh oui, notre Tesla pèse malgré tout 1’238 kg sur la balance, soit plus de 300 kg de plus que la Lotus Elise. D’une pichenette sur l’accélérateur je m’introduis dans la circulation. La récupération d’énergie au lever de pied joue le rôle de frein moteur ne nécessitant quasi jamais l’utilisation de la pédale des freins pour décélérer en ville. Attention également aux piétons car sans bruit et posé au ras du sol, même orange pétant et feux allumés, le roadster passe quasi inaperçu, ou du moins n’est que tardivement remarqué.
Je m’extirpe vers des routes moins engorgées. Le premier ruban de goudron désert me permet de juger des qualités d’accélération. Mode « standard » engagé, je mets le pied droit au fond. D’emblée les 400 Nm et les 288 CV délivrent une partie de leur hargne sur le train arrière. La motricité est tout bonnement parfaite et le propulseur pousse sans fin dans un bruit de turbine un tantinet pousse-au-crime… Les limites légales sont dépassées en moins de temps qu’il ne faut pour le dire et le bolide file à toute berzingue sans même nécessiter un passage de rapport. Déconcertant, oui, mais surtout grisant !
Ceci dit, l’embonpoint causé par les batteries se ressent immédiatement sur le comportement. L’agilité proverbiale du châssis Lotus en prend pour son grade et devient plus pataud. Les mouvements de caisse en accélération et freinage sont très perceptibles, mais l’amortissement garanti aussi un confort ferme mais ménageant les occupants. La Tesla se montre également très sous-vireuse dès lors que les conditions d’adhérence se dégradent. Sinon l’ensemble reste en définitive très sain, efficace et précis en conditions normales. Une fois lancée, la direction devient forcément plus légère, très communicative et directe.
Le mode « performance » permet d’utiliser l’entier de la puissance des batteries, soit 200 kW. L’accélérateur devient plus sensible et les relances sont gratifiées d’un « coup de pied » magistral. Mais à moins de l’utiliser sur circuit, ce mode nuit malgré tout à une conduite coulée, déjà ultra-performante avec le mode par défaut à chaque démarrage. Sans parler de l’incidence sur l’autonomie, bien entendu.

 

Verdict

Au final, la Tesla Roadster démontre qu’il est possible de mêler plaisir de conduite et conscience de l’environnement. Oui, ce n’est qu’un début et beaucoup de contraintes annexes persistent (temps de chargement, autonomie). Mais Tesla semble avoir empoigné la problématique par le bon bout, là où nombre de grands constructeurs piétinent.
Malgré un prix d’achat exorbitant, la marque de San Francisco a réussi à susciter un engouement unique. Plus de 1’800 exemplaires parcourent les routes du monde, dont plus de 100 en Suisse. Meilleure publicité, elle a même conquis Hollywood, où nous retrouvons parmi les prestigieux propriétaires George Clooney, Arnold Schwarzenegger ou Matt Damon, peut-être lassés de leur Toyota Prius.
S’il est une troisième ou quatrième auto à acheter pour rouler différent tout en distillant un plaisir unique, la Tesla mérite d’être dans votre short-list pour autant que la question du budget ne soit pas rédhibitoire. Dépêchez-vous également car la production devrait cesser en janvier prochain…

 

 

Prix et options – Tesla Roadster Sport 2.5

Prix de base : CHF 142’200.-
Inclus : suspension sport, jantes forgées finition noire, pneus hautes performances

Peinture Premium “Very Orange” : CHF 2’400.-

Package accent Fibre de carbone polie (extérieur) : CHF 9’300.-

Pare-brise avec protection anti-UV : CHF 490.-

Hard-top en fibre de carbone polie : CHF 6’000.-

Intérieur cuir avec finitions fibre de carbone polie et sièges Premium : CHF 13’700.-

Pack électronique : CHF 5’300.-

Connecteur portatif universel (220V / 32A) : CHF 1’800.-

Prix TOTAL : CHF 181’190.-

 

Pour partager vos impressions, rendez-vous sur le forum UltraSportives.

 

Nos remerciements à Tesla Motors Ltd. pour le prêt de cette Tesla Roadster Sport.

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