29 May 2023
2023-05-29
S’ils sont fous ces gaulois, c’est bien de passion. Une passion pour une marque qui le leur rend bien, celle du A fléché : Alpine.
Texte et photos : Xavier Bais
Alors toutes les occasions sont bonnes pour se retrouver et partager ensemble des anecdotes et autres souvenirs. L’année passée, le prétexte étaient les 100 ans de Jean Rédélé. Plus de 1’100 Alpine étaient venues des quatre coins de la planète.
Cette année, c’était pour le 50ème anniversaire du titre de Champion du Monde des Rallyes obtenu par Alpine en 1973. Étaient présentes un peu moins de voitures qu’en 2022 mais tout de même entre 700 et 900 selon les sources. Et une foule d’adorateurs d’Alpine était là. A l’honneur, des Hommes et des Femmes, un titre, des métiers et une immense passion pour une marque bien française.
Mais revenons en arrière pour mieux comprendre cet engouement pour Alpine, de sa renaissance à son futur proche.
La naissance
C’est à quelques encablures de Paris, dans un village de bord de mer nommé Dieppe, qu’au milieu du 20ème siècle, un certain Jean Rédélé même pas trentenaire participe à des rallyes automobile. Au volant d’une Renault 4CV, il remporte d’abord le Dieppe-Rouen puis le Mont Ventoux. En 1950, avec son ami Louis Pons, il continu à écumer les courses et à gagner (Liège-Rome-Liège) malgré une 4CV peu puissante face aux Ferrari. En 1952, toujours au volant d’une 4CV, il remporte sa catégorie aux Mille Miglia. Il passe à côté du Rallye Monte-Carlo mais en 1954, il remporte une coupe au Critérium des Alpes. Au fil des épreuves, il améliore ses voitures. Il double la puissance du petit 750 cm3 qui passe de 20 à 40 ch. Il crée même une boite 5 rapports. C’est cette année qu’il réalise ses plus belles courses sur les routes sinueuses des Alpes et glane diverses récompenses. En 1955, ces fameuses routes alpines inspirent le nom qu’il donne à ses voitures : Alpine. Le coach 106 est né. Le numéro fait référence à la mécanique des 4CV de la série 1060. De la 108, on passe à l’A110 présentée au salon de Paris en 1962. L’Histoire est lancée.
En 1964, la victoire du prototype M64 aux 24 Heures du Mans le conforte dans ses choix techniques : créer des voitures légères.
En 1965, Alpine s’associe à Renault et dès 1966, les voitures sont distribuées par le réseau de la Régie. L’entreprise est artisanale et le début des années 70 constitue sa période de gloire.
En 1968, Jean Claude Andruet remporte le Championnat de France des Rallyes sur une 1300 et récidive en 1970 sur une 1600.
En 1971, Jean-Pierre Nicolas remporte le Monte-Carlo. A cette époque, Marc Mignotet, mécanicien et préparateur hors pair, extrapole un 1’800 cm3 sur la base du 1600. Cette même année, Alpine remporte son premier titre de Champion d’Europe des Constructeurs en rallye.
En 1973, c’est l’apothéose : avec une équipe de pilotes de renom, Andruet, Darniche, Nicolas, Thérier, Piot et Ove Andersson, Alpine est sacrée Championne du monde des rallyes en remportant 6 victoires sur 13. Cette même année, Renault prend une participation majoritaire dans Alpine.
En 1978, Jean Rédélé, qui ne se sent plus vraiment maître à bord, quitte l’entreprise, non s’en s’assurer que Renault conserve les emplois sur le site de Dieppe pendant quinze ans.
Les années 80 ne seront pas les plus fastes pour Alpine et 1995 voit l’arrêt de l’A610, la dernière Alpine.
La renaissance
Après un arrêt de dix-sept ans, c’est en novembre 2012 que Carlos Ghosn, alors PDG de Renault, annonce la renaissance d’Alpine. Quelques mois plus tard, un prototype Renault Alpine nommé A110-50 est présenté par Carlos Tavares, 50 commémorant les 50 ans de l’emblématique Berlinette A110.
En 2015, Carlos Ghosn dévoile le concept de la prochaine Alpine nommé Vision qui préfigure la future Alpine A110 dévoilée début 2017. C’est en décembre de la même année qu’est inaugurée la ligne de production à Dieppe. C’est en mars 2018 qu’est livré la première Alpine A110. Les ventes progressent rapidement, avec environ 2’000 exemplaires en 2018 et le double en 2019.
La gamme évolue et monte en puissance avec les versions S puis R. Mais normes oblige, les prochaines Alpines seront électriques. D’ailleurs, à l’occasion de cette manifestation, nous avons pu découvrir pour la première fois le concept car roulant A290_β, une future citadine sportive, mais aussi l’A110 E-ternité et l’Alpenglow qui incarne le futur design de la marque. Le compte à rebours est lancé et toute la famille Alpine est prête à migrer vers la production de véhicules électriques.
La reconnaissance
Dès 2013, Renault décide d’engager la marque Alpine en LMP2 aux 24 Heures du Mans et en European Le Mans Series (ELMS). Un partenariat est noué avec Signatech. Une Oreca-Nissan est rebadgée Alpine et remporte une première victoire aux 3 Heures de Budapest.
Dès 2021, l’écurie Renault F1 Team est rebaptisée Alpine F1. L’année suivante, l’écurie de Formule 1 Alpine annonce le programme Rac(H)er qui vise à féminiser davantage l’ingénierie et le pilotage féminin.
Alpine est présent sur d’autres « fronts » et se lance de nombreux défis. Ainsi naissent des Alpine A110 Cup, Alpine A110 GT4 ou encore l’Alpine A110 Rallye. Dernier en date, l’Alpine Pikes Peak qui s’alignera dans la catégorie Time Attack 1 avec Raphaël Astier derrière le volant, tout un programme.
Alpine est également présente cette année en LMP2 ou elle engage deux voitures. La présentation d’une hypercar LDMh prévue pour 2024 ne devrait tarder. On vous en dira plus après les 24 Heures du Mans.
Ce rassemblement a permis à chacun, passionné ou simple badaud, d’échanger autour de la marque Alpine et de découvrir le « Musée éphémère » inauguré par plusieurs personnes dont Madame Rédélé qui semble par ailleurs avoir apprécié l’A290_β. Le lendemain, sous un petit chapiteau, on pouvait découvrir les différents corps de métier qu’intègrent Alpine au sein de l’usine, l’occasion de constater l’implication du personnel et la volonté d’Alpine d’ouvrir aux femmes des postes auparavant réservés aux hommes. Les procédés de fabrication sont modernes mais la main de l’homme y a encore la part belle.
Dieppe est une ville accueillante qui vit avec Alpine et joue le jeu le temps d’un week-end prolongé. Différents petits rallyes et séances de roulage étaient organisés tout au long de la manifestation. J’ai pu faire un essai routier de l’A110 R, version allégée proposant 300 ch et 340 Nm ; de pur bonheur avec un équilibre remarquable. Sportive mais qui sait rester confortable malgré les baquets Sabelt ! Juste parfaite. Seuls regrets : le son un peu discret malgré quelques crépitements au lâché de gaz en mode sport, une exclusivité un peu chère payée et surtout de ne pas pouvoir rentrer avec pour l’essayer sur nos routes de montagne. Mais ne vous inquiétez pas, c’est normalement prévu pour bientôt.
J’ai aussi pu tester brièvemennt l’A110 S, dont nous vous avons proposé un essai complet l’été dernier, un peu plus sage en termes de look et avec des baquets plus confortables. Elle me semble être le compromis idéal pour un usage routier. Il y a aussi la GT qui offre plus de confort tout en conservant la sportivité de sa mécanique.
Pour clôturer cette manifestation, un grand repas a été servi sous un grand chapiteau avec diffusion d’images commémorant Alpine, l’année 1973 et autres anecdotes racontées pas différentes personnalités, pilotes ou mécaniciens rappelant ce passé glorieux. C’est sûr, Alpine n’a pas renié son âme de battante.
Comme tous les autres constructeurs, avec l’électrique, elle prend un virage à 90° mais n’est-ce pas ce qu’elle sait faire de mieux ?
Nos remerciements à Renault / Alpine Cars Suisse SA pour l’invitation à cette édition 2023 des Alpine Dieppe Gathering.