14 October 2015
2015-10-14
Après le succès relativement mitigé de la X-Type, Jaguar revient sur le terrain des berlines du segment D avec la XE. Voiture totalement nouvelle, ligne racée et motorisations intéressantes, tous les atouts sont présents pour venir faire de l’ombre aux allemandes. Les impressions de Wheels And You après deux semaines à son volant.
Texte : Sébastien Morand / Photos : Claude-Alain Ferrière
Ce n’est pas la première fois que nous le disons, mais c’est un fait qu’au fil de nos essais Jaguar, nous pouvons confirmer encore et encore que les berlines de la marque sont bien loin l’image de la grosse voiture pour cinquantenaire. Le félin britannique affirme sa volonté de conquérir une nouvelle clientèle, plus jeune et plus dynamique, en proposant des voitures très désirables, et cette nouvelle XE en est le dernier exemple en attendant l’arrivée du premier SUV de la marque, le F-Pace.
Après l’expérience X-Type (2001 – 2009), de l’eau a coulé sous les ponts et, surtout, le groupe indien Tata a repris les rênes depuis 2008. Du coup, fini la Ford Mondeo rebadgée et place à une véritable nouvelle voiture qui promet bien des qualités sous sa robe raffinée. Pour l’occasion, nous avons hérité du fleuron de la gamme équipé du 3.0 V6, tout un programme.
A l’extérieur
Dès les premiers instants où j’observe cette Jaguar XE deux sentiments contradictoires me chicanent.
D’un côté, je suis sous le charme de cette calandre fuselée, de ces optiques avant au regard perçant, de la ligne très dynamique alliant élégance et sportivité ainsi que du capot moteur plutôt long et des hanches bien présentes qui surplombent les belles jantes 19 pouces.
Mais de l’autre, notamment en la regardant de trois quart arrière, j’en viens à lui trouver un bon nombre de similitude avec ses concurrentes germaniques. Son dessin deviendrait presque commun, sans aller jusqu’à dire banal, et, finalement, si on ne prend pas le temps de s’attarder sur la proue, dans la circulation, on pourrait la confondre avec ses rivales. C’est peut-être la teinte « Rhodium Silver » qui accentue cette impression, tant il est courant de croiser des berlines allemandes grises métallisées.
Bien sur les designers ont mûrement réfléchi à tout cela et pour aller récupérer des parts de marché la stratégie est excellente. Surtout que pour l’oeil avisé, celui qui saura apprécier les détails, pas de doute, nous sommes bien en présence d’une Jaguar, véritable félin sauvage qui ne demande qu’à bondir pour avaler l’asphalte. L’élégance britannique est bel et bien présente dans les gênes de cette XE, l’exercice est à mes yeux très réussi.
Je reviendrai encore sur la couleur de notre voiture d’essai à qui le pack « Black » en option (CHF 200.-) confère une apparence vraiment racée, la combinaison est très réussie ! D’ailleurs, rien de tel que cette finition, finalement peu onéreuse, pour effacer encore un peu plus l’image vieillotte que certains se font d’une Jaguar.
A l’intérieur
Je me glisse à bord de la berline anglaise et, en habitué des véhicules du groupe Jaguar Land Rover, je me sens immédiatement en terrain connu. L’instrumentation, les boutons et la fameuse molette du sélecteur de vitesse sont des choses que nous connaissons déjà. Autre détail typiquement Jaguar, la partie supérieure du tableau de bord qui souligne le pare-brise et vient se noyer dans les hauts des intérieurs de portes. En terme de nouveauté, il faudra s’attarder sur la console centrale relativement épurée et bien spécifique à cette nouvelle venue. D’ailleurs, cette présentation se retrouvera dans la nouvelle mouture de sa grande sœur, la XF, qui vient d’arriver sur nos routes.
Le constructeur a également travaillé sur son interface infotainement et, même si les menus ne changent pas drastiquement, il faut reconnaitre que le tout est plus moderne. Niveau fonctionnalités, rien à redire, tout est présent et de surcroit de série sur notre voiture d’essai. Certes, il faut admettre que le fonctionnement n’est pas aussi performant que chez la concurrence, mais c’est aussi ça, le charme britannique.
D’ailleurs, toujours pour parler de différence, l’habitacle est à mes yeux bien plus plaisant que ceux des berlines allemandes que j’ai toujours trouvé trop austère, voire triste pour certains. Alors oui, dans la XE, l’expert critique notera une finition légèrement en retrait, en fait un peu moins rigoureuse devrais-je dire. Mais ce léger bémol est, selon moi, compensé par une présentation plus originale.
L’assise est très confortable, c’est aussi ça une Jaguar, et cela aussi bien à l’avant qu’à l’arrière. Justement, vous pouvez accueillir trois occupants sur les places arrière, cela dans un confort indiscutable, avec un espace correct, rien de phénoménale cependant, mais tout à fait dans les standards du marché. Le coffre, quant à lui, dispose d’un volume de 455 litres pouvant atteindre 830 litres en rabattant la banquette arrière. Là non plus, rien d’extravagant, mais cela reste suffisant.
Sous le capot
La Jaguar XE dispose d’un grand choix de motorisations, principalement des quatre cylindres mais également un 3.0 V6 compresseur, celui qui équipe justement notre voiture d’essai.
Avant d’en parler, je mentionnerai brièvement les autres mécaniques, à savoir deux diesel et deux essence. Il s’agit en fait de deux moteurs uniquement, mais avec des niveaux de puissance différents. Le 2.0 Turbo diesel dispose de 163 CV (XE E-Performance) ou de 180 CV (XE 20d), il s’agit du nouveau moteur Ingenium développé par le groupe Jaguar Land Rover. Quant à l’essence, également un 2.0 Turbo, il propose 200 CV (XE 20t) ou 240 CV (XE 25t). Si ces derniers, tout comme le 3.0 V6, sont couplés uniquement à une excellente boite automatique 8 rapports, vous pourrez éventuellement opter pour une manuelle 6 rapports sur les déclinaisons diesel.
A noter que la transmission se fait exclusivement sur les roues arrière. Point de système 4×4 pour l’instant, mais c’est à priori au programme pour tout bientôt. On ne peut que l’espérer quand on connait l’engouement pour les tractions intégrales dans notre pays.
Pour revenir au moteur de notre voiture, il développe 340 CV à 6’500 t/min pour un couple de 450 Nm à 3’500 t/min. A la rédaction nous le connaissons bien puisque nous l’avions essayé dans le Range Rover Sport, mais surtout dans la F-Type Roadster avec une puissance majorée à 380 CV pour cette dernière. Premier constat, et je l’avais déjà noté en essayant le Range Rover Sport, c’est bien dommage que ce V6 ne chante pas aussi bien que dans la F-Type. Certes c’est un peu mieux que sur le Range, mais ça manque encore de vocalise à mon goût. En terme de puissance également, c’est plutôt rationnel qu’extravagant, mais j’y reviendrai plus tard. Reste à espérer que le constructeur se décide à nous proposer une version R ou R-S de la XE, avec si possible les quatre roues motrices.
En terme de consommation, si la fiche technique promet un modeste 8.1 l/100km en cycle mixte, j’aurai pour ma part mesuré une moyenne de 12.5 l/100km ! On est bien loin des valeurs du constructeur, mais il faut reconnaitre que je n’ai pas hésité à solliciter pleinement la mécanique. Et un jaguar qui court, c’est un jaguar qui a soif. Je pense qu’en étant un peu plus raisonnable, il ne serait pas difficile de gagner quelques litres.
Au volant
Sous le charme de ses lignes et relativement envouté par le ronron de son V6, je m’applique maintenant à découvrir les sensations que cette Jaguar XE procure.
La prise en main est facile, la XE se dompte avec aisance. Les trajets urbains se font avec facilité et, une fois sur l’autoroute, le silence est de mise, la destination est atteinte sans encombre en toute quiétude.
Même au moment d’attaquer quelques routes de campagne, cette Jaguar XE ne faillit pas, elle fait tout très bien. Presque trop en fait, je retrouve le sentiment que j’ai eu au moment de la regarder, ce côté « voiture allemande » à qui il est difficile de reprocher quelque chose, si ce n’est un petit manque d’effervescence. Mais non, ce n’est pas possible ! Est-ce que cette petite Jaguar aurait vraiment perdu le grain de folie qui anime habituellement les voitures d’outre-manche ? Avant de répondre, je dois dire que j’ai eu des doutes pendant un moment. A vouloir grappiller des parts de marché à Audi, BMW et Mercedes, les ingénieurs ont peut-être bien réussi le produit parfait qui donnera à la clientèle l’impression d’être au volant d’une allemande…
Oui oui, croyez-moi, cette Jaguar XE est belle est bien la plus allemandes des anglaises qu’il m’a été donné de conduire, et tout aurait bien pu s’arrêter là. Je vous aurais dit que cette nouvelle berline Jaguar est réussie à tout niveau, que la X-Type va disparaitre de vos esprits en moins de temps qu’il ne faut pour le dire et que les marques allemandes ont du souci à se faire. Mais, parce que oui, il y aurait eu un grand « MAIS » : à moi personnellement, ça n’aurait pas plu complétement, je l’aurais trouvée trop normale, en fait pas assez britannique, presque ennuyeuse à conduire, comme je déplore à le dire lorsque je prends les commandes d’une allemande, etc, etc…
Fort heureusement, je ne me suis pas contenté de cela et je me suis dit qu’il fallait bousculer un peu cette Lady. J’ai donc passé la boite sur « S », activé le mode Dynamic et je me suis dirigé vers quelques petites routes qui me sont chères. Et là, sous ses airs sage et paisible, la Jaguar XE se dévergonde et révèle son tempérament de fauve. La puissance du V6 compresseur vous propulse en avant et, bien posée sur la route, la XE avale les courbes avec un comportement relativement sportif. La prise de roulis est contenue, mais surtout on ressent bien l’arrière train qui pousse, il montre même quelques envies de ruades dignes d’une véritable propulsion. Quel plaisir de conduite, on est plus habitué à retrouver un tel feeling tant les voitures modernes sont généralement sous-vireuses.
Verdict
Alors, OUI, cette nouvelle Jaguar XE est bien placée pour aller titiller la concurrence allemande, tant son agrément de conduite se rapproche de ces dernières. Elle est, certes, un peu en retrait sur certains points, notamment pour la finition ou l’ultra-perfection, en revanche elle arbore un style largement plus élégant. A voir maintenant si la clientèle, notamment dans notre pays, osera miser sur originalité.
Dernier point, et pas des moindres, les tarifs. Là aussi il y a du boulot pour changer les à prioris des gens. Car, non, une Jaguar ce n’est pas plus chère qu’une BMW, une Audi ou une Mercedes. Je dirais même qu’en comparant tout de manière détaillée et vraiment équivalente, vous pourriez avoir des bonnes surprises. Donc pour la XE 3.0 V6 S, l’addition débute à CHF 62’200.- avec un équipement très bien fourni de série, mais sachez que les prix de l’entrée de gamme (XE E-Performance avec boite manuelle) commencent à CHF 40’800.-.
Au final, pour cesser de croire que, Jaguar, c’est des voitures de vieux, allez découvrir cette XE, je suis persuadé qu’elle saura vous faire changer d’opinion !
Prix et options – Jaguar XE 3.0 V6 S
Prix de base : CHF 62’200.-
Peinture métallisée Metallic/Mica : CHF 920.-
Toit coulissant panoramique avec pare-soleil électrique : CHF 1’540.-
Jantes en alliage 19″ Vernon à 5 doubles rayons avec finition Black : CHF 1’200.-
Système “angle mort” avec surveillance du trafic : CHF 680.-
Système de son 380 Watt de Meridian avec lecteur simple CD/DVD : CHF 640.-
Vitres teintées y compris lunette arrière : CHF 420.-
Mise à niveau 10 couleurs pour éclairage intérieur ambiance : CHF 400.-
Réception radio DAB+ : CHF 360.-
Pare-brise athermique : CHF 280.-
Pack Black : CHF 200.-
Prises électrique 12 V (places arrière et coffre) : CHF 100.-
Capteur de qualité de l’air avec fonction automatique air recyclé : CHF 100.-
Prix TOTAL : CHF 69’040.-
Pour partager vos impressions, rendez-vous sur le forum UltraSportives.
Nos remerciements à Jaguar Land Rover (Suisse) SA pour le prêt de cette Jaguar XE 3.0 V6 S, ainsi qu’au garage Autobritt SA pour leur soutien logistique.
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