30 July 2024

L’Alpine A110, icône des rallyes durant les années 60 et 70, a vu sa renaissance se concrétiser en 2017 avec un design très proche de l’original qui suscite autant de sympathie que sa devancière. Déclinée dès 2019 en une version GT, plus confortable, et une version S peaufinant sa sportivité, Alpine parachève le développement de sa Berlinette avec une ultime version intitulée A110 R.

  • 4 cylindres, essence, turbo, 1’798 cm3
  • 300 ch à 6’300 t/min
  • 340 Nm de 2’400 à 6’000 t/min
  • Boîte de vitesses double-embrayage, 7 rap.
  • Vitesse maxi : 286 km/h
  • 0 à 100 km/h en 4.0 sec.
  • Poids : 1’095 kg
  • Long./larg./haut. (mm): 4’256 x 1’798 x 1’238
  • Conso. mesurée : 9.61 l/100 km
  • Emissions CO2 : 156 g/km (D)
  • dès CHF 110’000.-, mod.essayé: CHF 116’517.-


Texte et photos : Claude-Alain Ferrière


Selon Alpine, il s’agit d’une voiture pensée pour la compétition mais homologuée pour la route. Et lorsque je découvre l’auto, je n’ai aucun mal à le croire tant les éléments issus de la compétition s’affichent ostensiblement.

Alors que la marque de Dieppe annonce que son futur sera exclusivement électrique, à l’instar de l’A290 qui vient d’être présentée lors des 24 Heures du Mans, l’A110 R est sans doute la dernière mouture qu’il nous sera donné de découvrir. Je suis donc impatient d’en prendre le volant et vérifier si elle est aussi radicale qu’elle en a l’air.

A l’extérieur

Pas de doute, elle en jette ! Excepté quelques supercars, j’ai rarement vu une auto routière aussi spectaculaire. Alors qu’une A110 S avec le pack Aéro est déjà agressive, la déclinaison R va encore plus loin, en particulier dans la teinte « Bleu Racing Mat ». Avec seulement 1.25 m de haut, les voitures aussi basses sont rares.

A l’avant, si la lame en carbone est identique, un nouveau capot, tout en carbone également, parfait l’aérodynamique via un passage d’air forcé qui maintient un écoulement laminaire de l’air au pied du pare-brise. Le toit carbone est celui déjà vu sur l’A110 S mais l’aileron arrière est désormais maintenu par deux montants de type « col de cygne » qui réduisent les turbulences sous l’aileron pour améliorer l’appuis aérodynamique. Autre différence, le pare-brise arrière disparaît et laisse place à un élément en carbone. Il dispose de grille d’aération pour le compartiment moteur.

Au bas de l’auto, les flancs accueillent de magnifiques bas de caisse carbone qui intègrent une dérive verticale devant la roue alors que le diffuseur arrière inclut également ces dérives à ses extrémités. On voit ici le travail effectué par les ingénieurs aérodynamiciens pour parfaire le ratio entre la trainée et l’appui à haute vitesse et ainsi permettre une meilleure vitesse de pointe tout en maintenant la vitesse de passage en courbe. Juste superbe ! Mais attention, alors que la voiture est rabaissée de 10 mm par rapport à la S, il faut être très attentif aux trottoirs et autres bordures tant ces éléments sont exposés.

Autre différence, l’échappement central unique – une caractéristique de l’ensemble de la gamme – fait place à une double sortie Racing. Enfin, les jantes 18″ GT Race sont spécifiques et chaussées de Michelin semi-slicks Pilot Sport Cup 2 de 215/40 ZR 18 à l’avant et 245/40 ZR 18 à l’arrière.

A l’intérieur

Autant cette déclinaison R est spectaculaire à l’extérieur, autant son intérieur n’évolue guère comparé à celui de la version S. La seule véritable différence consiste en la présence de magnifiques sièges baquet en carbone dans le plus pur style compétition, offrant un maintien parfait. Placés très bas, seul celui côté conducteur est réglable manuellement. Les ceintures de sécurité disparaissent au profit de harnais 6 points Sabelt, un équipement idéal pour les track days mais guère pratique au quotidien. Dans la démarche d’optimisation sportive, dommage qu’Alpine n’ait pas supprimé la microfibre imitation Alcantara qui recouvre tableau de bord et contre-portes pour gratter quelques grammes supplémentaires et offrir un habitacle plus radical.

Un point très positif que le constructeur français maintient contre la tendance actuelle : les palettes de passage des rapports fixes sur la colonne de direction plutôt que rattachées au volant. On peut ainsi passer les vitesses en plein virage et quelle que soit la position du volant sans se poser de question.

Avec l’évolution rapide du domaine, l’infodivertissement paraît d’un autre temps, avec des options limitées. Il intègre toutefois Apple CarPlay et Android Auto. Comme sur la S, il propose l’Alpine Telemetrics qui permet de suivre certains paramètres moteur et les performances de l’auto. Je regrette toutefois que ces informations n’incluent pas les températures d’huile et d’eau qui seraient bien utiles en roulage circuit alors qu’à contrario, l’affichage de la puissance et du couple instantanés ne sont guère primordiales. Les options d’affichage sont limitées à quelques paramètres sur l’écran compteur.

Côté rangements intérieurs, il n’y en a guère : juste un espace sous la console centrale. Il y a possibilité d’ajouter l’option Pack de rangement qui consiste en une sorte de tube triangulaire fixé entre les dossiers de siège, contre la paroi moteur. On n’y met guère que la pochette de service et un porte-monnaie. Quant aux coffres, celui situé sous le capot propose 96 litres alors qu’à l’arrière, le volume atteint 100 litres. De quoi partir en week-end à deux à condition de se limiter à un sac souple par personne.

Sous le capot

Là non plus, il n’y a guère de changement. L’ensemble moteur-boîte est rigoureusement identique à celui des versions S et GT. C’est donc toujours un 4 cylindres en ligne turbocompressé à injection directe de 1.8 litres de cylindrée en position centrale arrière. Il affiche une puissance de 300 ch (221 kW) à 6’300 t/min et un couple de 340 Nm constant entre 2’400 et 6’000 t/min. Il est accouplé à une boîte robotisée à 7 rapports et double-embrayage.

C’est par son poids moindre que l’A110 R évolue. Allié à la coque en aluminium, l’usage extensif du carbone limite la masse à 1’095 kg à vide. C’est 34 kg de gagnés par rapport à l’A110 S avec le pack Aéro et cela sans les jantes Aerocarbone arborées lors de sa présentation. Le rapport poids/puissance atteint 3.6 kg/ch. Grâce à ce gain allié au travail aérodynamique et au rabaissement de l’auto, la vitesse maximale progresse pour atteindre 284 km/h en pointe. A puissance égale, c’est 9 km/h de mieux que la S. Le 0 à 100 km/h gagne aussi deux dixièmes de seconde à 4.0 sec. C’est presque une demi-seconde de mieux qu’une Porsche 718 Cayman GT4 ! Quant au 1’000 mètres départ arrêté, il est abattu en 22.0 secondes, une jolie performance.

Comme indiqué au préalable, la garde au sol est abaissée de 10 mm par rapport à une A110 S et les combinés ressort/amortisseur filetés permettent de descendre l’auto de 10 mm supplémentaire pour la conduite sur circuit.

La consommation annoncée est de 6.8 l/100km en cycle mixte. J’ai pour ma part mesuré 9.61 l/100km sur l’entier de mon essai.

Au volant

Si ce n’est des contre-portes ainsi qu’un tableau de bord recouverts d’Alcantara ou l’absence d’un arceau, je me croirais presque dans une voiture de course, ce d’autant que je dois boucler le harnais six points. C’est un dénuement presque total, avec uniquement le strict nécessaire. Je retrouve mes réflexes pour entrer dans une auto très basse et suis immédiatement très bien installé, avec l’assise du siège presque sur le plancher et un volant que je peux suffisamment approcher. J’appuie sur le gros bouton Start et le 4 cylindres s’ébroue dans des tons graves et rauques. Une pression sur le bouton D pour Drive et l’auto roule en automatique. Les passages de rapports sont parfaitement doux, sans à-coup.

Pas besoin de faire beaucoup de kilomètre pour appréhender un châssis réglé aux petits oignons mais uniquement pour une conduite sportive. Les suspensions sont raides, très raides, à l’instar d’une voiture de rallye. Avec l’assiette rabaissée, il y a peu de débattements et la moindre bosse secoue l’auto. Mais cette rigueur offre un fonctionnement optimal de la monte pneumatique et une adhérence assez stupéfiante à ce petit bolide. Sur le sec, les vitesses de passage en courbe sont bluffantes. En déclenchant l’ESC, la voiture se place volontiers aux freins et la remise de gaz plaque l’arrière et favorise la motricité en sortie de virage. C’est diablement efficace d’autant que la direction est extrêmement incisive et précise.

Je passe en mode Sport et là, surprise : à part le son du moteur qui se fait un peu plus présent – notamment avec d’inutiles pétarades très artificielles au lever du pied – et un passage des rapports accéléré, rien ne se passe. Avec le couple constant sur les 4’000 t/min de la plage d’utilisation, le moteur est si linéaire qu’il gomme toute sensation d’accélération, à tel point qu’on se demande si les 300 ch sont bien présents. Un coup d’œil au compteur atteste que ça accélération bel et bien ; c’est juste une question de sensations et compte tenu du positionnement très sportif de cette A110 R, je trouve cela un peu dommage. A titre de comparaison, une Alfa Romeo 4C, bien que moins puissante, se montre nettement plus démonstrative sur ce point. Un mot encore sur le freinage : les disques acier sont suffisamment puissants pour freiner le poids contenu de l’auto. Par contre, ils surchauffent rapidement en conduite sportive en descente et le fading apparaît vite. Ceux qui iront régulièrement sur circuit devront prévoir un remplacement des disques et plaquettes par du matériel plus adapté. Dommage alors que la vocation de l’auto est justement la piste.

Mes commentaires ne seraient pas complets si j’omettais de préciser que l’A110 R n’est vraiment pas adaptée à un usage quotidien. La gymnastique pour « descendre » dans le baquet, l’absence de ceintures de sécurité qui obligent à boucler le harnais 6 points à chaque trajet, la raideur, pour ne pas dire dureté des suspensions, l’absence totale de visibilité trois quarts arrière, l’équipement minimaliste et le niveau sonore élevé dans l’habitacle en font un magnifique jouet de conduite plaisir mais une auto vraiment trop spartiate pour envisager de l’utiliser au quotidien, où on lui préfère une version S est nettement plus adaptée.

Verdict

Alors que cela fait une quinzaine d’années que je contribue à Wheels And You pour vous présenter nos essais, j’ai rarement roulé une auto homologuée sur route aussi affûtée par son châssis ultra-sportif. Alors que la plupart des concurrents proposent des séries spéciales certes affûtées, ils conservent pour leur très grande majorité les éléments de confort des déclinaisons moins sportives ; rares sont ceux qui radicalisent leur version sportive comme le fait l’Alpine A110 R.

Sur le marché récent, à part l’Alfa Romeo 4C et les différentes versions de la Lotus Exige que j’ai eu l’occasion de rouler, mais qui ne sont plus proposés aux catalogues des constructeurs en question, ou peut-être la Porsche 718 Cayman GT4 RS, dont nous espérons pouvoir vous proposer un essai prochainement, il n’y a guère de concurrence.

Si on parle de prix, l’A110 R n’est pas bon marché. La quantité de pièces en carbone explique sans doute un prix de base à CHF 110’000.-, auquel il convient de rajouter pour notre véhicule de test la peinture « Bleu Racing Mat » et le pack rangement, pour un total de CHF 116’517.-.

Tout ceci fait de l’Alpine A110 R la plus extrême des A110 que Wheels And You ait essayée et une voiture bien attachante, autant par son design affirmé que par ses performances assez stupéfiantes.

Prix et options – Alpine A110 R Turini

Prix de base : CHF 110’000.-

Peinture « Bleu Racing Mat » : CHF 6’000.-

Pack de rangement : CHF 517.-

Prix TOTAL : CHF 116’517.-

Pour partager vos impressions, rendez-vous sur notre page FaceBook.

Nos remerciements à Renault / Alpine Cars Suisse SA pour le prêt de cette Alpine A110 R Turini, ainsi qu’au Centre Alpine RRG Lausanne à Ecublens pour leur soutien logistique.

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