17 October 2019
2019-10-17
Comme nombre de véhicules de lignées iconiques, la Camaro laisse tomber le toit depuis de nombreuses décennies. De quoi ajouter encore plus d’extase à la conduite d’une « Muscle Car » américaine, exercice qui prodigue déjà une bonne dose de fun. Cet essai de la sixième génération est le bon moment pour faire le point sur la proposition de Chevrolet en matière de plaisir.
Texte et photos : Matthieu Giraudier
Les Camaro, c’est déjà 52 ans d’histoire, aussi bien pour la version Coupé que la déclinaison Cabriolet. Si Chevrolet n’a pas attendu pour proposer une automobile à toit rétractable dès 1967, il faut tout de même noter qu’entre 1969 et 1987, le modèle n’a pas profité d’une version « convertible », la mise étant intégralement placée sur le Coupé. Depuis la fin des années 80 cependant, le public s’est vu offrir la possibilité d’opter pour une conduite les cheveux au vent.
A l’amorce de ce test, deux questions me viennent immédiatement : est-il toujours exaltant d’allier V8 et cabriolet ? Les « muscles cars » n’ont-elles pas perdu toute leur essence, ce qui fait leur sel si caractéristique ? C’est plein de curiosité que je me lance au volant de cette Camaro.
A l’extérieur
C’est une habitude chez moi : en préparation d’un test, j’aime parcourir le Net à la recherche de photos de l’automobile venant à l’essai. Je me fais ainsi une idée des petits détails à observer sur le modèle réel. Si, sur les clichés, la Camaro paraît bien, très bien même, en vrai, l’effet est encore plus puissant. La machine interpelle par son caractère, ses lignes, son allure générale, un brin m’as-tu-vu mais ô combien américaine dans l’esprit.
La face avant est l’élément fort de la voiture. Après une cinquième génération qui a opté pour un design néo-rétro fortement inspiré de l’année-modèle 1967, la sixième vague capitalise sur ce dessin en y ajoutant de la nervosité dans les formes et une certaine détermination dans le regard. Les projecteurs avant sont une vraie réussite et constituent la clef de voûte du concept. Incrustés dans la partie supérieure de la calandre, dans la jonction des flancs et du capot, ils apparaissent comme froncés, plissés, donnant au tout un air franchement racé. La forme globale de la calandre, rectangulaire mais convexe dans la profondeur, apporte une réelle originalité au modèle et lui confère un net esprit porté vers l’avant.
L’arrière mise lui aussi intégralement sur les feux, très en volume, creusés par deux cavités, détachant distinctement les phares Stop des autres lumières. Le fin aileron, faiblement élevé au-dessus du panneau de poupe, affiche une faible inclinaison et semble être davantage un élément stylistique plutôt qu’aérodynamique. Certains apprécieront ce petit élément en plus, d’autres se seraient contentés d’un petit becquet sur le pavillon.
Le bouclier arrière s’articule autour de « joues » légèrement protubérantes, et s’autorise la petite originalité de déporter le phare de recul sur la partie basse. Les quatre sorties d’échappement, de taille médiane, viennent parfaire le tout.
Sur les flancs, on reste sur un concept assez contemporain, avec une jupe marquée et une ligne de ceinture haute. Dans le pur style américain, les épaulements des roues arrière sont fortement marqués et donnent au design global une assise certaine et bienvenue.
La Camaro a dans l’ensemble un style estampillé « USA », en rien discret, avec une face avant affirmée et très graphique. Je suis particulièrement fan de ce genre de parti pris, clivant, ne laissant personne indifférent. C’est simple et efficace : on adore ou on déteste. A titre personnel, je suis conquis.
A l’intérieur
La Camaro Cabriolet est définitivement une 2+2. Loger des enfants sur les places arrière n’est pas chose aisée, mais encore possible. Y faire entrer des adultes est une procédure périlleuse qui se fait au prix de nets sacrifices à l’avant.
La sensation globale de qualité est d’une manière absolue assez bonne, bien que l’intégration de certains éléments soit un peu particulière. Le moniteur central pour commencer est légèrement incliné sur le plan horizontal, avec une base d’écran enfoncée dans la planche de bord. La lisibilité en est de fait altérée et le toucher à l’écran est spécial. Un petit désagrément en rien mortel, mais qui génère un feeling pas souhaitable. Le système qu’il embarque va à l’essentiel, en proposant les solutions de connectivités les plus modernes. La réactivité du moniteur est correcte et la qualité de l’affichage se situe dans la section basse du marché, avec un léger écueil au niveau de la vision pour les caméras de recul, dans la juste limite de l’acceptable de jour, et pas franchement top de nuit. Les buses de ventilation centrales sont quant à elles placées très bas. De nouveau, rien de rédhibitoire, simplement spécial et moins fonctionnel.
Dans un registre plus impactant, le paquet d’assistances à la conduite fait pâle figure, comparativement à ce que le marché de l’automobile propose aujourd’hui. Si la détection dans l’angle mort est proposée de série, le régulateur de vitesse équipé n’est pas actif et se limite à être un simple « tempomat ». Un choix étonnant pour un véhicule ayant pour vocation première le voyage en rythme de croisière. Je regrette aussi l’absence de la fonction « limitateur », bien pratique dans une circulation moyennement fluide, d’autant plus quand le régulateur n’est pas dynamique. Chevrolet fait aussi l’impasse sur les soutiens au freinage d’urgence, sur la protection cycles/piétons ainsi que sur l’aide au maintien sur la voie. Dommage.
Parmi les points positifs, on peut citer le tableau de bord qui s’habille d’un cadre très design et original. Il se compose de deux cadrans analogiques intégrant au centre un afficheur numérique reconfigurable à souhait. La liste des possibilités dans l’affichage est impressionnante, dans mon top 3 des moniteurs les plus customisables que j’ai pu tester. Un vrai bonheur pour les âmes un peu « geek ».
En matière de confort, le rendu est hétérogène. Lorsque le pavillon de toit est replié, le rejet du vent est très bien maitrisé. On profite d’un habitacle vivable où il est parfaitement possible de tenir une conversation ou de profiter de la musique diffusée par le très bon système Bose offert de série. Une fois le plafond déployé, la qualité de l’insonorisation est moyenne. L’atténuation de l’ambiance sonore environnante est clairement perceptible, mais des bruits parasites viennent altérer la tranquillité, les jointures de portes étant là où le bât blesse essentiellement.
Les assisses proposent un bon confort et s’avèrent être assez enveloppantes, voire trop, n’acceptant pas vraiment les gros gabarits. Pour jouer avec les clichés, c’est un élément surprenant pour une américaine, trouvant majoritairement son public dans un pays où le surpoids n’est pas un fait négligeable. Affichant personnellement un solide gabarit, être au poste de conduite comme sur la place passager est parfaitement vivable, mais pas pour de longues virées. Je ressens vite des pressions sur le flanc des cuisses, m’encourageant à m’arrêter.
Dernier élément à noter, le coffre peut adopter deux configurations : plein espace, n’autorisant pas le retrait du toit ou fractionné, avec le déploiement d’une cloison clipsable, qui réduit à peau de chagrin le volume de chargement à tout juste deux bagages à mains. Le système de cloisonnement est simple et pratique mais se détache malheureusement trop facilement. Voulant rétracter la capote, il m’arrive de devoir ressortir de la voiture pour le remettre en place. Encore une fois, rien de méchant, mais un désagrément dont on se passerait bien qui peut toutefois être spécifique à notre voiture d’essai.
Sous le capot
La variété de groupe motopropulseur se cantonne à deux propositions : la déclinaison Turbo alliée avec la boîte automatique à 8 rapports ou la version V8, aussi dotée de la transmission auto 8 vitesses.
Le premier choix propose un bloc 4 cylindres en lignes d’un volume de 1’998 cm3 qui déploie 275 chevaux à 5’500 t/min et 400 Nm de couple dès 3’000 t/min. Les performances annoncées sont un 0 à 100 km/h achevé en 5,9 secondes et une vitesse max de 240 km/h.
La seconde option, celle qui nous intéresse puisque équipant notre modèle d’essai, le fameux V8 de 6.2 litres, qui développe 453 chevaux à 5’700 t/min et un couple massif de 617 Nm, disponible à 4’600 t/min. Pour cette architecture, le constructeur annonce une vitesse maximum de 250 km/h et un 100 km/h atteint en 4.6 secondes, depuis l’arrêt.
Avec pareille cylindrée, la consommation ne fait naturellement pas dans la retenue : en cycle mixte, la valeur tourne autour des 14.5 litres aux cent kilomètres. En cycle autoroutier, elle descend à un acceptable 9 litres aux cent, tandis qu’en ville, rester sous les 20 litres tient de l’exploit.
Au volant
Je vais être franc. Je me présente à cet essai la tête chargée de clichés et de préjugés. Une « Muscle Car » américaine, ça a de la « gueule », ça fait du bruit, mais niveau conduite, ce n’est pas la panacée. Outil à « burnout », pour les lignes droites, ça passe, mais une fois qu’il faut tourner, il n’y a plus personne. J’ai prévenu, je suis dans le dur niveau idées reçues. Cette Camaro va-t-elle me faire mentir ?
Comme indiqué auparavant, l’allure de la machine me parle. C’est ostentatoire à souhait, franchement bling-bling, mais qu’importe. Ça parle au rappeur west-coast qui dort en moi. Les choses continuent à me plaire quand j’allume le moteur. La sonorité de l’échappement est nativement réglée sur « Sport », vous vous doutez donc que la discrétion est morte. Le V8 lâche un son rauque et sourd, mais clairement dense. Je ne peux retenir un sourire satisfait, malgré les quelques regards réprobateurs de l’audience avoisinante.
Assez rapidement, je constate que la voiture plaît à un large public. Bien que ne bataillant pas dans le segment luxe, son caractère exotique séduit. Sans délai, je ne compte plus les automobilistes qui me font signe de faire rugir le moteur, les passants qui me hèlent pour m’adresser un pouce approbateur. Si vous voulez être vu, cette voiture peut être pour vous. Les timides, passez votre chemin.
La frime, c’est une chose, mais que vaut la voiture sur la route ? Je passe rapidement sur mes pérégrinations en ville : la voiture est large, le capot est long, la manœuvrer dans le cœur des zones urbaines est un exercice peu agréable. Le vrai terrain de jeu, c’est la route ouverte.
Sans trop attendre, je me décide à pousser la mécanique dans les limites. Pas de retenue, je veux voir ce que la bête offre. Je choisis un endroit isolé de première qualité, la chaussée parfaite, lisse, pleine de grip. Le temps est sec, la température idéale. Les conditions sont ainsi parfaites. Je laisse le mode « Normal » et je plante le pied au plancher : la Camaro fait feu sans réserve. Pas de « burn » à proprement parlé, mais les roues motrices partent en glisse, l’arrière chasse doucement, juste ce qu’il faut pour rire sans se mettre en danger. Le tout revient rapidement en ligne. Clairement le mode « novice » pour ceux qui n’ont pas de talent de pilote.
L’accélération est franche, colle un peu au siège, sans pour autant filer une claque. Je peux sentir que la mécanique est lourde. Le réglage moteur n’aide pas non plus, le couple maximum arrivant tout de même tard (4’600 t/min). Le premier virage arrive et je l’aborde avec un dynamisme mesuré. Le transfert de masse est impressionnant, le roulis est très présent. Je suis tout de même étonné : je suis ballotté dans l’habitacle, mais ça passe facilement. Je monte le rythme pour la prochaine séquence de tournants. A ce point, j’en demande déjà un peu de trop. Sur le freinage, l’arrière est totalement délesté d’appui. Au coup de volant, assez logiquement, l’arrière part, progressivement certes, sans grosse rupture, mais part quand même. L’électronique prend rapidement le dessus, pour ramener tout le monde à la raison. Je suis d’ailleurs assez bluffé par le contrôle embarqué, franchement sécure et bien adapté pour les non-initiés. Les systèmes autorisent du « fun » raisonnable.
Je passe en « Sport » puis en mode « Track ». Je sens clairement la progression dans la réduction des assistances et dans la cartographie moteur. Le moulin devient de plus en plus nerveux, la souplesse diminue, mais le gain en efficacité est trop timide. La faute à la boîte automatique trop molle, en rien affûtée. Les passages de vitesses sont lents, la perte de dynamique notable. Je ne sens pas de raffermissement dans la direction, mais je perçois clairement que les suspensions se raidissent. La vitesse de passage en courbe augmente, mais il faut user de doigté pour éviter une fin d’essai tragique. Il demeure que la Camaro ne devient vraiment intéressante, à mes yeux, qu’en mode « Track », avec contrôle manuel de la boîte. Si la rapidité de la transmission fait encore défaut, j’ai entre les mains un V8 rageur qui botte les fesses, et je fais face à une voiture qui affiche un vrai tempérament, qui glisse, qui fait du bruit, qui vrombit. Une vraie « Muscle Car ».
Revenue sur la plaine, je passe en rythme de croisière. La balade à l’air libre est plaisante. Pour pleinement profiter de la promenade, il faut alors vraiment adopter une conduite souple et une allure très tranquille. Si votre passager est un peu sensible en voiture, l’effet « bateau » que renvoie la voiture en mode « Normal » peut vite avoir raison de lui.
Verdict
Mais alors, cette Camaro nourrit-elle les clichés sur les sportives américaines ? Oui et non.
Oui, parce que l’esprit premier de la Camaro est resté. C’est une voiture qui a du caractère, pourvu que vous le laissiez s’exprimer ; c’est une voiture qui s’affiche, se distingue, se fait entendre. La philosophie « Muscle Car » est aussi là : en mode « Normal », elle glisse déjà (très raisonnablement certes). Mais en mode « Track », on a le droit au package complet.
Non, parce que les puristes diront que c’est bien trop sage comparativement aux premières générations, la modernité ayant fait son œuvre. C’est effectivement bien plus permissif, moins « on/off » comme auparavant. Mais c’est là à mon sens la qualité de ce défaut : elle est accessible et autorise différents pallier de plaisir.
Dans l’ensemble, cette Camaro Cabriolet comporte quelques défauts notables et regrettables, surtout dans sa dotation intérieure. Il demeure qu’elle est pleine de charme et de tempérament.
Prix et options – Chevrolet Camaro Cabriolet V8 Sport
Prix de base : CHF 63’955.-
Couleur extérieure Gris « Watkins Glen Gray » métallisé : CHF 1’000.-
Sièges baquets haute performance RECARO® avant : CHF 2’300.-
Prix TOTAL : CHF 67’255.-
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Nos remerciements à Cadillac et Chevrolet Europe pour le prêt de cette Chevrolet Camaro Cabriolet V8 Sport, ainsi qu’au Garage Guex SA à Bremblens/Morges pour leur soutien logistique.
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