Essai – Ford Mustang GT Fastback V8 : Poney pour grand enfant

A la seule lecture du titre de l’article, une multitude d’informations doit déjà vous traverser la tête. Pareille icône de l’industrie automobile déplace avec elle un bout d’histoire, des souvenirs, des scènes de films cultes mais aussi des préjugés. Je vais tenter de faire le tri parmi ces idées reçues sur les “Muscle Cars”, avec un V8 en fond sonore.

  • V8, essence, 4’951 cm3
  • 451 ch à 6’000 t/min
  • 529 Nm à 4’600 t/min
  • Boîte de vitesses automatique, 10 rap.
  • Vitesse maxi : 249 km/h
  • 0 à 100 km/h en 4.3 sec.
  • Poids : 1’831 kg
  • Long./larg./haut. (mm): 4’784 x 1’916 x 1’381
  • Conso. mixte : 13.9 l/100km
  • Emissions CO2 : 270 g/km (G)
  • dès CHF 53’400.-, mod. essayé: CHF 61’300.-


Texte et photos : Patrick Schneuwly


Chez Ford, il y a des noms connus même des néophytes. Avec la Ford T et la GT, la Mustang est certainement au palmarès. Quand on parle de ce monument, on ne peut s’empêcher de penser aux grands espaces américains et aux longues lignes droites qui les traversent. Les “Muscle Cars” sont nées là-bas, en installant un gros moteur dans un châssis plutôt dépassé.

La Mustang MY2018 hérite des points forts de ses aînés mais se modernise pour garder sa place dans ce monde d’efficience énergétique et de chasse à l’insécurité. Je ne saurais pas vous dire si celle-ci a encore le charme d’une Pony de 68, en revanche comptez sur moi pour vous parler d’expérience et de plaisir de conduite ! Il suffit de presser un bouton pour se laisser envoûter.

A l’extérieur

Le look de cette Mustang est saisissant, on reconnaît l’allure d’une “Muscle Car” au premier coup d’œil. Elle ne diffère pas énormément du modèle 2015 seulement, sous cette robe Orange Fury, elle me rappelle le concept Mustang GT-R de 2005. J’adore.

Son long capot rebondi intègre des prises d’air très dynamiques, la calandre arbore fièrement son cheval sauvage au galop. Les ailes proéminentes cachent les roues de 19”. A l’arrière, un imposant diffuseur abrite deux doubles sorties d’échappement, tandis que les phares en 3 bandes évoquent évidemment les modèles des années 60.

Le bouclier avant a le plus perdu des Mustang d’époque. Fini les phares et la calandre sur un seul plan, place à un dessin beaucoup plus profilé. Les phares à LED et au xénon exacerbent l’agressivité des reliefs de l’avant. Seul inconvénient, la lèvre au ras du sol est proéminente et, en l’absence d’aide au stationnement avant, il faut deviner où elle se termine depuis le siège conducteur.

A l’intérieur

Pour proposer la voiture à un prix concurrentiel, des choix ont dû être faits quant aux matériaux et assemblages de l’habitacle. Visuellement, c’est de bonne facture. Il y a quelques approximations, comme les bouches d’aération ou le centre du volant en plastique bon marché.

La planche de bord mélange divers matériaux, avec deux plastiques moussés et surpiqués. Devant le passager, une casquette arbore un insigne Mustang et juste avant le levier de vitesse, quatre “toggle switch” rappellent les anciens modèles d’une façon élégante. Pour habiller le tout, un insert argenté peu flatteur. Celui-ci peut être remplacé par du carbone, ce qui interdit d’opter pour les sièges sport Recaro qui équipe justement notre voiture d’essai !

L’ensemble compteurs est ce qui se fait de plus moderne, avec un écran couleur qui affiche clairement les informations. Il y a trois présentations possibles avec un ou deux cadrans à aiguilles et même un bargraphe du compte-tour pour une utilisation sur circuit. Le conducteur peut même choisir parmi 10 les deux couleurs dominantes de l’affichage pour le personnaliser.

Étonnamment, le second écran de cette voiture, celui du GPS, ne rend pas gloire à la Mustang. Au démarrage la cinématique est belle, mais on est ensuite en face de la même interface qu’à bord du Ford Transit essayé précédemment. Une petite déception lorsqu’il suffit de reprogrammer un appareil existant, mais il n’y a pas de petite économie.

Sous le capot

On n’appelle pas “Muscle Car” une voiture s’il n’y a pas un V8 en position avant. Celui-ci fournit 451 ch et 529 Nm aux roues arrière au travers d’une boîte automatique à 10 rapports. Pour 5 litres de cylindrée, ces chiffres ne sont pas impressionnants, j’ai même envie de dire que la porte de l’écurie a dû rester ouverte. Avec les nombreux modes de conduite, son comportement change grandement, jusqu’aux modes les plus extrêmes Sport+, Circuit et course Dragster.

Les trains roulants se sont bien améliorés depuis l’abandon de l’essieu rigide à l’arrière. Maintenant dotée de suspensions indépendantes et même du système Magne Ride en option, cette Mustang propose une tenue de route loin de ce qu’on imagine chez une américaine. Le freinage n’est pas en reste avec un impressionnant système Brembo siglé en rouge.

Cette nouvelle génération de Mustang n’hésite pas à s’équiper d’aides à la conduite modernes : régulateur de vitesse actif, aide active au maintien de la voie, direction à divers niveaux d’assistance. Ainsi le cheval au galop sait se faire sage, mais aussi discret grâce à l’échappement actif. Le V8 s’étouffe sur commande et à heures fixe si on souhaite de bonnes relations de voisinage.

Au volant

Déverrouiller la voiture projette immédiatement le logo Mustang sur le sol. Rien d’inédit, mais l’effet est toujours captivant. Les sièges Recaro assurent une bonne assise, mais le réglage manuel est fastidieux et l’accès à l’arrière dérègle le siège en plus de ne pas être pratique.

Une fois le V8 sorti de sa torpeur, levier de vitesse sur D, l’américaine égraine immédiatement les rapports pour être en 5ème à 50 km/h à peine. Direction en mode confort, on l’emmène du bout des doigts. Pour se frayer un chemin, seul le rayon de braquage limité et le manque de visibilité au-delà de l’énorme capot sont handicapants. Pourquoi mettre des capteurs de stationnement qu’à l’arrière s’il faut deviner où se termine l’avant ?

Mais venons-en aux faits. Une Mustang se conduit pour le fun, pour prendre la route sans destination. C’est là qu’elle montre un autre visage. Faites fi de tout préjugé, cette américaine sait prendre un virage et pas seulement au ralenti. Sans paramétrer la voiture, la prise de roulis et le survirage sont flagrants. Seulement, une fois qu’on touche à la suspension, à la direction et à la transmission, la “Muscle Car” se mue en un coupé sport plutôt agile.

Le mode Sport+ offre le plus de potentiel sur route : suspension ferme, direction plus direct et passages de rapports retardés. On profite enfin des vocalises du V8, avec l’échappement sport, ainsi que de la puissance de ce bloc. Au sommet de la courbe de puissance et de couple, la Mustang avale très vite la bande de goudron qui relie les virages. Le gros système de freins prend tout son sens, car bien qu’équipée de palettes au volant, le frein moteur de notre Mustang peine à être efficace avec 10 rapports. Et je dirais même que c’est perturbant pour le conducteur, car on ne sait pas quel ordre donner.

Sur route sinueuse, cette Ford ne ménage pas ses efforts pour tenir aux pavés. Avare en retour d’informations au volant, elle n’en devient cependant pas imprécise. L’arrière reste stable pour autant qu’on ne provoque pas volontairement un survirage. En désactivant les garde-fous, un bon pilote n’aurait aucun mal à passer tous les virages d’un col en dérive. A la façon de Vaughn Gittin Jr. qui s’est offert un tour de Nürburgring en 1 seul drift.

Pour parler d’un usage beaucoup plus puéril d’une Mustang, je me surprends à libérer l’échappement et mettre la transmission en sport, juste pour partir d’un feu rouge. Le râle du V8 dans l’habitacle me réjouit à chaque fois. Mais je peste aussi à chaque fois contre ses innombrables changements de vitesse qui se font, certes, en douceur, mais coupent tout l’élan de l’accélération. Imaginez que là où une voiture passerait 3 vitesses, la Ford en a passé 6, voire 7. Il faut toutefois reconnaitre que cette boite est plus efficace que la précédente et permet d’améliorer le bilan énergétique de notre belle américaine.

Tout au long de mon essai, la consommation moyenne du V8 s’est établie à 13.9 l/100km, alors que le constructeur annonce 12.1 l/100km en utilisation mixte. Bon j’admets, j’ai globalement su garder le pied léger pour obtenir une telle valeur, et sur un trajet en mode cruising, j’ai même réussi à mesurer un très honorable 8.9 l/100km. Ah ben c’est sur, sans être raisonnable, une telle motorisation, c’est un budget ! On a rien sans rien me direz-vous…

Verdict

Les idées préconcues sur les américaines ont la vie dure, je n’ai pas pu m’empêcher d’y penser en commençant cet essai. En une poignée de kilomètres, on remise ses préjugés pour pleinement profiter d’une icône qui a su évoluer.

Son look capte immédiatement le regard, surtout dans la teinte de notre voiture d’essai. Je ne me lasse pas de la regarder de face en refermant la porte du garage. Au regard du prix, son intérieur qui mélange héritage et modernité ne souffre que d’un véritable défaut : cet écran central si peu esthétique.

Avec son échappement actif, la Mustang est devenue politiquement correct : aphone tôt le matin et extravagante pour se remonter le moral quand on quitte le bureau. Mais la vraie avancée est qu’elle n’est pas à l’aise qu’en ligne droite. Avec sa suspension Magne Ride, elle tient la comparaison face à des GT européennes. Reste à envisager la boîte manuelle plutôt que cette transmission automatique difficile à appréhender en usage dynamique sur route. On devrait le vérifier au printemps avec un autre essai qui promet d’être excitant…

Vous désapprouvez ce verdict ? Oh pardon, je ne vous entends pas derrière les vocalises du V8.

Prix et options – Ford Mustang GT Fastback V8 5.0, boîte automatique à 10 rapports

Prix de base : CHF 53’400.-

Couleur “Orange Fury” : CHF 800.-

Sièges Recaro, cuir partiel, Ebony : CHF 2’000.-

Pack Custom 3 : CHF 3’100.-
(GPS, DAB+, FordSYNC3, Premium Sound B&O 12 haut-parleurs, habillages intérieur exclusifs avec surpiqûres, jantes alu forgées 19”, etc.)

Système d’amortissement – Magne Ride : CHF 2’000.-

Prix TOTAL : CHF 61’300.-

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Nos remerciements à Ford Motor Company (Switzerland) S.A. pour le prêt de cette Ford Mustang GT Fastback V8, ainsi qu’au garage Bütikofer Automobile AG à Frauenfeld pour leur soutien logistique.

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